Notre critique de La Poya

Illustratrice et auteure illustratrice, Fanny Dreyer est l'un des piliers du fanzine Cuistax. Elle semble si bien implantée à Bruxelles qu'on en arrive à oublier qu'elle est suisse – née à Fribourg – et qu'elle partage son temps entre la Belgique et son pays d'origine. C'est d'ailleurs une maison d'édition suisse, La joie de Lire, qui a publié son premier livre, Le mystère du monstre, sur un texte de Corinna Bille. C'est aussi la Suisse et ses montagnes qui est au centre de La Poya, son dernier album, publié par la même maison d'édition. La poya c'est ainsi qu'on nomme la transhumance, non seulement dans les Alpes suisses mais aussi dans le Jura et les Alpes françaises. Par extension, on appelle poya la représentation en peinture de ce double voyage. Certains chalets de montagne arborent une poya sur leur fronton. Est-ce ce genre de peinture tout en longueur qui a suggéré à Fanny Dreyer de se tourner vers le leporello? En tous cas, la forme accordéon s'avère ici particulièrement bienvenue : la longue bande de papier recto verso marque bien le temps de l'aller, des trois mois d'alpage et du retour entre printemps et automne. Pour son jeune narrateur, c'est une première. Une première aussi pour Lise, sa vache préférée. Pour tous les deux, le voyage sera donc initiatique. En dehors d'un court "journal de bord" en bas de page, le texte se fait rare : quelques mots d'encouragement, quelques onomatopées, juste de quoi faire entendre les soupirs, les ronflements et le son des cloches de vaches. Personnages et animaux ont été peints à l'écoline avant d'être découpés et collés sur un fond blanc. Et comme Fanny adore personnifier la nature, elle a donné des yeux à ses montagnes. Sur son blog (même si elle exprime des réticences quant au format adopté) l'artiste se déclare ravie de ce chemin "qui se déploie à l'infini". (Maggy Rayet)