Caroline Lamarche

PRÉSENTATION
Née à Liège en 1955, licenciée en Philologie romane de l’Ulg, titulaire du Prix Robert Goffin 1990 pour ses premiers poèmes, Caroline Lamarche entre en littérature par un recueil de nouvelles J’ai cent ans, réédité au Serpent à plumes en 1999. Mais c’est avec Le Jour du chien, publié aux éditions de Minuit en 1996, qu’elle obtient le prix Rossel et la reconnaissance de la critique et du public. Ce roman qui se présente comme une suite de variations sur le thème du chien errant le long d’une autoroute, campe d’emblée l’univers de l’auteur : Nous évoluions sur un fond si noir que la vie ne nous laissait que le choix des couleurs. Dans ses premiers livres, l’écriture est le signe d’un conflit intérieur et d’un attrait pour un érotisme violent, ainsi dans  La nuit l’après-midi (Minuit 1998) et Carnets d’une soumise de province (Gallimard 2004). L’oeuvre, qui comprend des nouvelles, des poèmes, des romans, des chroniques, des pièces radiophoniques, des textes pour la scène et pour l’art, est riche d’un éclectisme fécond. Elle comprend plusieurs romans publiés chez Gallimard, dont L’OursLettres du pays froidKarl et LolaLa Chienne de Naha (salué par la une du Monde des Livres), ou La Mémoire de l’air, monologue guidé par l’étrange beauté d’un rêve. Aux Impressions nouvelles, Mira est un recueil de trois nouvelles onirico-érotiques, finaliste du prix Sade. Dans la maison un grand cerf (Gallimard 2018) a obtenu le prix Europe de l’ADELF et le Prix triennal de la Fédération Wallonnie-Bruxelles. Nous sommes à la lisière a été distingué par le Goncourt de la Nouvelle 2019.  La fin des abeilles (Gallimard 2022), hommage rendu à une mère très âgée disparue en temps de pandémie, fait écho, sur le plan intime, à la saga familiale déployée dans L’Asturienne (Les Impressions Nouvelles, 2021) consacrée à ses ancêtres pionniers de la métallurgie du zinc en Espagne. Plusieurs de ces livres ont été traduits, en espagnol, néerlandais, anglais, ukrainien, italien, etc. Quant à la littérature jeunesse, elle a accueilli Le Phoque (Le Rouergue), La poupée de Monsieur Silence (Fremok), Tetti, la sauterelle de Vincent (Pastel/L’Ecole des Loisirs) et Mille arbres (Cotcotcot éditions). Familière par ailleurs des travaux en collaboration, Caroline Lamarche s’associe régulièrement au travail de photographes sur des terrains sensibles, dernièrement avec Cédric Gerbehaye pour Zoonose (2022) et avec Françoise Deprez pour Toujours l’eau - juillet 2021 qui fait mémoire des terribles inondations de juillet 2021 dans les vallées de l’Ourthe et de la Vesdre.
PORTRAITS ET ENTRETIENS
Le Carnet et les Instants

Quand j’ai annoncé à Caroline Lamarche que ce portrait paraîtrait dans le numéro thématique du Carnet dévolu à l’érotisme, elle a réagi aussitôt en me disant que cela n’était plus son objet.
Ce ne pouvait être, à mes yeux, une réaction vraiment négative, une fin de non-recevoir. Ce propos demandait enquête, réflexion, discussion. Ce que nous avons entrepris, par téléphone, mails et lors de rencontres. Il n’était évidemment pas question d’exclure l’écriture de l’érotisme de son œuvre passée et présente. Mais il fallait en définir l’incidence, en circonscrire le rôle exact. Reconsidérer l’ensemble de sa production. Noter la récurrence thématique en question mais aussi la relativiser. Et pour cela peut-être aussi confronter les points de vue…

PRIX
NOS EXPERTS EN PARLENT
Le Carnet et les Instants

Il est difficile de s’arracher au ton mineur qui prélude au dernier récit de Caroline Lamarche, Dans la maison un grand cerf. Dès le départ, le battement irrité du sang, le sifflement dans les oreilles vient oblitérer l’écoute. Pourtant elle a lieu l’écoute tout intime et si particulière du père qui, en contraste avec le bruit de la conversation à la table familiale, poursuit son marmonnement discret. Déjà cet environnement envahissant et le brouhaha général font comme une censure et évoquent la violence, que ce soit celle de la meute, des chasseurs, de l’amour même qui lui aussi peut forcer. Mais Lamarche dira tout de l’amour éternel des filles pour leur père, quoi qu’il en aille de ses aléas. Il aurait été et serait encore un antidote aux complications de…


Le Carnet et les Instants

Caroline LAMARCHE, Nous sommes à la lisière, Gallimard, 2019, 165 p., 16 € / ePub : 11.99 €, ISBN : 9782072819292


Le Carnet et les Instants

Elle est craquante, Tetti. Ses yeux mangent son visage, et son regard éclate d’expressivité. La peur, la timidité, la curiosité, l’amusement, la fatigue, l’inquiétude… les émotions et les sensations se dessinent en complète transparence sur son joli minois. Quant à son corps gracile, il se recroqueville et se détend en un instant, tout de vert recouvert ! C’est que Tetti est une charmante sauterelle dont « la vie ne dure qu’un été. Jeune, elle est déjà vieille ». Sa brève existence se déroule en Provence où, quand elle ne fuit pas les enfants (dont le sombre dessein est de l’accrocher à un fil de pêche pour appâter des victimes à écailles), « [s]ans cesse, elle s’élan[ce] vers la lumière ».Et c’est ainsi qu’elle rencontre Vincent. Cet homme,…


Le Carnet et les Instants

Oui, qui vraiment étions-nous ? se demande Caroline Lamarche dans son dernier récit, L’Asturienne, qui parait aujourd’hui aux Impressions Nouvelles et dans lequel elle (re)découvre l’histoire des siens.Tout commence douze ans après le décès de son père (2001), dans la cave de la maison familiale où l’autrice retrouve une vieille malle contenant des dizaines de dossiers, autant de documents soigneusement archivés par Freddy Lamarche sa vie durant. Caroline Lamarche entame alors un long travail de recherches qui l’amène à poursuivre le grand œuvre du père, recomposant l’histoire de la famille Lamarche-Hauzeur, ces pionniers de la métallurgie.Dans une langue ciselée, l’autrice retrace comment ses aïeux, d’abord propriétaires terriens en Hesbaye, terminent au fond…


Le Carnet et les Instants

Présenter Caroline Lamarche serait vain. Ne pas souligner son étonnant talent, inexcusable. L’étoile Lamarche brille au sein d’une constellation qui n’a de cesse de s’étendre et de renforcer à chaque mouvement la cohérence de son noyau. Dans le ciel des mots, sa lumière n’aveugle pas ; elle éclaire ou filtre, souligne ou enrobe. Elle se suit, en prose ou poésie, récits denses ou narrations longues, solo ou collaborations, imaginaires d’enfants ou univers pour adultes. L’oralité tient également une place lumineuse dans la sphère littéraire lamarchienne : ses textes ont de nombreuses fois été mis en scène et elle a écrit plusieurs pièces radiophoniques. C’est d’ailleurs l’une de ces dernières qui se trouve à la base de ce roman pour jeunes adolescents,…


Le Carnet et les Instants

Le nouveau récit de Caroline Lamarche se referme avec des ruisseaux sur les joues, au milieu des premières abeilles du printemps – osmia bicornis, de petites abeilles rousses et solitaires, disparues des zones d’agriculture intensive mais toujours présentes en zones urbaines. Attirées sans doute par  les filets de lumière qui serpentent entre les phrases, par les mots solaires pour dire la nuit, elles contreviennent à leur solitude pour se réunir sous la voûte de papier. Là où Dans la maison un grand cerf (Gallimard, 2017) touchait à la première grande disparition, celle du père, La fin des abeilles se penche sur la figure de la mère, sa très longue vie et sa fin considérablement étirée.J’écris pour tenir le choc du vieillissement accéléré de ma mère. J’écris…


Le Carnet et les Instants

Femme, 40 ans, milieu aisé, mariée, deux enfants, un amant qu’elle vient de quitter, souhaite devenir chaste pour se consacrer pleinement à l’écriture. Contrairement à celle qui figurait dans La nuit, l’après-midi, où l’héroïne répondait à une invitation sadomasochiste, cette petite annonce n’apparaît pas telle quelle dans L’ours, dernier roman de Caroline Lamarche, mais demeure à l’état de vœu que se formule la narratrice.
Pourtant, son appel sera entendu : par un prêtre qui a lu son précédent roman et lui écrit à ce propos une lettre suffisamment pertinente pour lui donner envie de le rencontrer. Appel para­doxal à priori (nul n’a besoin de personne pour ne pas faire l’amour), mais qui se ré­vèle nécessaire comme mise à l’épreuve. Fable…


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Caroline LAMARCHE (autrice) et Françoise DEPREZ (photographe), Toujours l’eau, juillet 2021, Caïd, 2022, 192 p., 20 €, ISBN : 978-2-930754-35-2Des flots. De boue. De furie. De toxicité. De ravage. Mi-juillet 2021, la région liégeoise, à l’instar d’autres parties du pays, est confrontée à des inondations meurtrières à plus d’un titre. Les images retransmises dans les médias, aussi apocalyptiques paraissent-elles, ne traduisent alors que partiellement l’ampleur de la catastrophe. « À la télé, on ne sentait pas la peur » (Guy) « Le bruit, c’était comme dans un film de sous-marin. Les meubles qui s’entrechoquaient en bas, la déflagration des arbres qui rentraient dans la façade. » (Luc) « L’odeur était terrible. Indescriptible. Une odeur de vieux,…


Le Carnet et les Instants

Du nichon, pardon, au sein du politiquement incorrect, il y a l’érotisme. Un genre soi-disant désuet, à la fois confus et diffus, c’est-à-dire complexe et donc incompatible avec notre moderne époque des #MeToo et #BalanceTonPorc. Nous vivotons dans une période manichéenne où la pudibonderie et la pornographie échangent plus aisément sur les tournantes sodomites ou sur la théorie des genres plutôt que — trop simplement — sur les corps. Période de vaches maigres pour l’érotisme ? Mort aux vaches quand même !

Jean Marchetti, galeriste du Salon d’art à Bruxelles, éditeur de La pierre d’alun depuis trente-cinq ans et « inventeur » de la collection La petite pierre, a dès lors pris le taureau par les cornes et mis toute son expérience et sa fantaisie…


Le Carnet et les Instants


Le Carnet et les Instants

Nouvelle curiosité de la collection « La petite pierre » aux éditions bruxelloises La pierre d’alun, Le livre du destin ou la divination par les cartes du Marquis de La Pierre d’Alun se veut aussi bien ludique et léger qu’ésotérique. L’ouvrage, en effet, ne camoufle pas ses intentions. Il a pour vocation de prédire l’avenir en s’appropriant le plus librement possible les règles de la divination.En ouverture, la préface du Livre du destin décrit les protagonistes d’un curieux jeu de rôle. Un jour, un Marquis n’en étant pas vraiment un, ancien coiffeur puis détenteur d’une galerie d’art, « [à] l’heure du parfait rayonnement de son double destin, [éprouve] le besoin d’en prédire la trajectoire future ». Le voilà donc qui commande à une collagiste…


Le Carnet et les Instants

Quand Caroline Lamarche s’associe à Paul Mahoux pour composer un roman graphique, on tient dans les mains une proposition limpide et intransigeante, qui architecture le sensible et l’état du désastre. L’extinction de masse et la mort annoncée d’une jeune fille inscrivent cet ouvrage dépourvu de couleurs dans une noirceur sans mensonge. Au scénario, la plume ligne claire, la simplicité des mots choisis par l’autrice de Nous sommes à la lisière. Au dessin, le carnet-de-croquiste en Moleskine et peintre Paul Mahoux, les traits fins et noueux, les aplats troués noir sur blanc. L’histoire de Dix ans mêle d’emblée l’intime et l’urgence climatique. En quatre tableaux, nous suivons l’évolution – menacée depuis l’origine – d’une enfant atteinte de mucoviscidose.…


Le Carnet et les Instants

Caroline LAMARCHE, Cher instant je te vois, Verdier, 2024, 96 p., 20 €, ISBN : 978-2-37856-198-7Après le roman (La fin des abeilles) et le roman graphique (Dix ans), c’est aujourd’hui à travers la poésie que Caroline Lamarche poursuit sa mise en mots des corps de femmes devenus proies. Le corps-proie est celui mangé par le temps ou la maladie, un corps toujours situé en regard des autres, migrants oiseaux animaux, ces amis entravés eux aussi par les servitudes d’une société délétère et que les vers libres de l’autrice portent dans l’espace, sur la crête tranchante d’un récit d’amour et de mort.[…] Margarida va venir, elle est dans la pluie des pétales que le gel arrache à l’arbre troptôt fleuri, dans la pureté d’un ciel rebelle à la douceur, dans le…


Karoo

Le dernier recueil de nouvelles de Caroline Lamarche, Nous sommes à la lisière,  décrit neuf rencontres entre humanité et animaux. Deux univers qui se ressemblent sans jamais se rejoindre complètement, et qui peuvent s’apprécier, mais sans jamais vraiment se comprendre.

Écrivaine et poète belge, Caroline Lamarche a voyagé entre Liège, où elle est née, l’Espagne et la région parisienne. Il n’est pas surprenant de lire des similarités entre des romans tels que Le jour du chien (Minuit, 1996), qui lui a valu le prix Victor-Rossel, et ses nouvelles qui incluent toujours au moins animal. Prix Goncourt de la nouvelle 2019, Nous sommes à la lisière ne faille pas à cette habitude mais va un pas (ou une patte ?) plus loin en ajoutant une sensibilité humaine à…


Karoo

À tous ceux qui rêvent de voyages au cœur de terres lointaines, la Chienne de Naha de Caroline Lamarche promet de les entraîner loin, très loin de la petite Belgique. Au Mexique, avec un conte triqui pour fil rouge, l’instant présent plonge ses racines dans le passé et l’ici devient l’ailleurs, dénouant les fils emmêlés de toute une vie.
Chez les Indiens triquis, un homme vivait seul avec sa chienne à Naha. Tous les jours, il partait en quête de nourriture. Mais, un jour, lorsqu’il rentra chez lui, il fut surpris de découvrir que tout était prêt. Le repas n’attendait plus que lui et un ordre absolu régnait dans la maison. Le lendemain, l’homme décida de se cacher derrière l’arbre qui bordait sa maison afin de découvrir l’explication de ce phénomène.…


Karoo

(Re)Connue de Karoo par ses fictions1, l’écrivaine Caroline Lamarche signe, avec L’Asturienne, son premier récit documentaire. Au-delà de l’histoire de la compagnie métallurgique éponyme et de la famille Lamarche-Hauzeur, il est question d’une critique subtile des déboires d’un capitalisme industriel inégalitaire et destructeur de la nature.
(Re)Connue de Karoo par ses fictions1, l’écrivaine Caroline Lamarche signe, avec L’Asturienne, son premier récit documentaire. Au-delà de l’histoire de la compagnie métallurgique éponyme et de la famille Lamarche-Hauzeur, il est question d’une critique subtile des déboires d’un capitalisme industriel inégalitaire et destructeur de la nature.
Caroline Lamarche a eu un jour l’idée d’ouvrir les malles de la…


Karoo

En mars dernier, Caroline Lamarche publie chez Gallimard La fin des abeilles, le résumé d’une vie : celle de sa mère. Une femme austère, mais attentionnée, abandonnée par le destin puis retrouvée par sa fille. Un coup de cœur richement bavard, qu’un article aussi bref ne pourra traiter entièrement.
En jeune lecteur que je suis, j’ai découvert Caroline Lamarche avec son roman le plus récent. Bonne ou mauvaise chose, La fin des abeilles restera sûrement un de mes romans préférés, et mon portail vers l’œuvre immense de cette autrice belge. Également poétesse et nouvelliste, ses chapitres courts répartis en trois grandes parties sont écrits avec une finesse rythmée et chantée. Ses sonorités amusées, ses ironies moqueuses, ses franchises déconcertantes et toute…