Une vie sous la langue : Journal 2001-2002



À PROPOS DE L'AUTEUR
Lucien Noullez
Auteur de Une vie sous la langue : Journal 2001-2002
Lucien Noullez est né à Bruxelles le 13 mai 1957. Il enseigne depuis 1978, publie des poèmes depuis 1985. Il s'est marié en 1983, a une fille, née en 1988. Il lit la Bible, écoute la musique (il joue de l'alto), est chroniqueur et critique littéraire. Une vie bien remplie, en somme. Et pourtant…"Je fais un métier plein de trous", dit-il dans un de ses poèmes. Comme il évoque dans le même recueil son "baluchon de paroles trouées", on peut soupçonner qu'il parle de son métier de poète. En fait, c'est dans notre monde (ou notre regard) que ses poèmes font des trous, pour qu'y passent l'humour, la tendresse secrète, la détresse des hommes aussi, et la familiarité avec Dieu, qui n'arrivent plus à nous atteindre derrière l'abri de nos vies calfeutrées, raisonnables et pieuses. On dit souvent que la poésie crée des liens entre les choses; mais il a fallu d'abord les détacher de leur support habituel, pour rapprocher les écoliers et une bande de nuages, les couettes d'une petite fille et deux jets d'eau, le ciel matinal et un lit mal fait. Ces nouvelles associations ne reconstituent pas un monde lisse et plein. Entre les êtres ainsi appariés reste un vide, où l'air circule; les tilleuls fredonnent dans la pluie, la ville est astiquée par les merles… Ces trouées nous rendent brusquement notre corps, notre ouïe, nos yeux. "Comprendre" les choses ainsi, c'est les aimer d'une certaine façon: non pas en les rivant les unes aux autres dans une explication rassurante, mais en leur laissant la liberté d'être elles-mêmes dans un voisinage éclairant – voisinage qui apporte parfois une réponse réconfortante qu'aucune raison n'aurait pu fournir. Dans l'une des chroniques qu'il donne régulièrement à 'La libre Belgique', Lucien raconte sa visite avec une classe au fort de Breendonk, où les nazis avaient installé une prison et une salle de torture. En pénétrant dans cette salle, une jeune africaine éclate en sanglots, sans doute taraudée par le réveil de souvenirs insupportables. Lucien la conduit dehors, l'accompagne en silence, et reçoit un appel téléphonique: il apprend la naissance de Corentin, le petit-fils de sa sœur: "Je l'ai dit, pauvrement, à mon élève dévastée. Je ne peux pas jurer qu'elle ait souri, mais je suis sûr, et plus sûr que certain, qu'elle était contente." C'est peut-être comme cela que Lucien procède dans ses poèmes, en ménageant des rencontres inattendues qui font changer, de proche en proche, les choses. L'amour "pauvre" du poète est de même nature que l'Amour auquel il fait confiance. Dieu ne remet pas tout en ordre (on s'en serait aperçu), mais il cherche une place, comme un inconnu arrivant parmi les buveurs accoudés au comptoir, comme une fillette handicapée agaçant légèrement les clients d'un grand hôtel "embrouillés dans leur vie superbe". Sans l'accueil de ces intrus, "le salut du monde ne sauve rien", dit le poète, et la poésie encore moins. Celle de Lucien tâche de s'accorder ( avec l'oreille du musicien) à cette gratuité stupéfiante, vraiment salutaire, qui se retrouve dans le trésor des mots. Comme un jongleur ses boules, il les lance en introduisant à chaque tour une couleur nouvelle: la bleue, l'orange (Eluard a montré l'exemple dans un vers célèbre…) Nous regardons, déroutés, amusés. Mais quand il a fini son numéro, c'est notre terre qui tourne un peu autrement. Jean-Pierre Lemaire 2 ŒUVRES QUE JE SOUHAITE FAIRE CONNAÎTRE André Dhôtel, Jean Follain Amos Oz, Une histoire d’amour et de ténèbres

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