Michaël Matthys s’interroge sur ce qui poussa des colons à chercher gloire et richesse dans une nature hostile, sombrant dans une une folie et une barbarie sans retour. Les grands formats au fusain et au sang forment dans son atelier une adaptation libre, monumentale, crue et captivante, d’une œuvre qui l’est tout autant, Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad.
Auteur et illustrateur de Kurtz
Michaël MATTHYS, Kurtz, FRMK, 2024, 368 p., 39 €, ISBN : 978-2-39022-041-1Il s’agit là d’un monument graphique. On peine à trouver les mots tant les images sont fortes. L’auteur, lui-même, pour d’autres raisons, s’en est fait très économe…En 1979, le monde découvre le film Apocalypse Now. Ce sont là 140 minutes d’une adaptation libre du livre Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad. Quarante-cinq ans plus tard, c’est à une autre « claque » qu’un public médusé a droit : une adaptation, en bande dessinée.Et qui d’autre que Michaël Matthys pouvait se lancer dans un tel projet ? En effet, l’auteur, connu pour son travail graphique et esthétique qui n’appartient qu’à lui, reprend…
Vienne, 1907. Le peintre Gustav Klimt rend visite aux époux Bloch-Bauer. Ferdinand demande alors à Gustav de réaliser le portrait de sa femme, Adèle ; requête entraînant un flashback. Six ans auparavant, alors que Klimt essuyait des critiques acerbes au sujet de son œuvre La Médecine , il a rencontré ce couple, admirateur de son génie et dont la femme l’a prié de lui ouvrir les portes de son atelier. Au même moment, l’artiste recevait en rêve l’inspiration pour son prochain tableau. C’est par ce prisme que l’on entre dans l’univers de l’artiste : son atelier, ses modèles, sa mère, sa compagne, Émilie, mais aussi ses rêves, ses angoisses, ses sources d’inspiration en somme. L’histoire narrée en bande dessinée par Cornette et Marc-Renier est une tranche de vie, prétexte à l’évocation du peintre, de son style, de son époque et de l’avant-gardisme dont il y faisait preuve. L’idée est en effet plus de mettre en avant ses particularités que de réaliser sa biographie. Le récit est assez simple et aurait peu d’intérêt sans l’aspect « inspiré de faits réels », mais n’en est pas moins cohérent et bien rythmé.Les dessins sont soigneusement détaillés. Le rendu est classique, avec un crayonné assez fort accentuant les sujets principaux. Les travaux de Klimt évoqués sont réinterprétés plutôt que cités et le résultat est réussi et efficace : le redesign des œuvres permet une intégration fluide dans les cases tout en invitant à les découvrir sous un angle neuf.Le récit principal est suivi d’un court cahier didactique sur Gustav Klimt. Il complète la bande dessinée en développant quelques sujets qu’elle évoque. On y voit notamment des reproductions des œuvres évoquées dans l’album. Ainsi, le lecteur a à portée de main de quoi satisfaire sa curiosité, titillée par l’histoire racontée en images et phylactères.La bande dessinée Klimt est une introduction sympathique à l’œuvre de l’artiste. Les connaisseurs n’apprendront probablement pas grand-chose, là où les néophytes apprécieront l’accessibilité du propos et les informations proposées en fin d’ouvrage. Les visuels soignés plairont aux amateurs de bande dessinée traditionnelle, alors que l’histoire…