Véronique Bergen peint en l’honneur de Jacques de Decker un véritable portrait de Dorian Gray. En Belgique, toute personne liée à la littérature le connaissait. Je le voyais régulièrement fréquenter les rayons « poésie » et « littérature belge » de la librairie Tropismes. Maintenant qu’il nous a quittés en avril 2020, l’académicienne, son ancienne consœur, nous conduit au grenier des Lettres, enlève la poussière et nous dévoile dans sa splendeur et sa beauté l’image intacte et vive de son être qu’il a enluminé tout au long de sa vie. En le lisant, j’ai eu le sentiment d’avoir perdu « le dernier des Belges », comme on a dit de nombreux personnages historiques qu’ils furent chacun « le dernier des Romains ». C’est l’incarnation de cette impossible unité qui révèle la richesse et la diversité de notre culture et de la personnalité qui s’y est plongée.
Paradoxalement, je connaissais mal l’homme qui avait brossé mon portrait à la remise de la bourse Horlait-Dapsens dont j’étais le lauréat pour l’Académie Royale de langue et de littérature françaises en 2018. Nous avions conversé ensuite, il m’avait fait part de sa passion pour Tchékhov et je lui avais exposé mon projet de traduction de poèmes russes sur la Belgique. Un mois avant son décès, à la foire du livre de Bruxelles, il nous avait confié à mon père et moi un secret : « Je me suis mis à la poésie, c’est un secret que je vous révèle ». Et avec son sourire facétieux, il avait quitté notre stand, en nous laissant une dernière impression, toujours vivace.
Autrice de Jacques De Decker. L’immortel de l’Académie royale de Belgique
Nouvelle collection de petits formats à parution mensuelle des éditions Lamiroy, « L’article » livre son deuxième volume. Véronique Bergen y esquisse Jacques De Decker, L’immortel de l’Académie royale de Belgique.L’exercice d’admiration est le cœur même de la collection (pour le premier numéro, Gorian Delpâture parlait de Stephen King comme du « plus grand écrivain du monde »). Dans ce genre codifié, Véronique Bergen a choisi d’évoquer celui qui a été le Secrétaire perpétuel de l’Académie pendant dix-sept ans, l’écrivain, le traducteur et intellectuel dont le décès le 12 avril 2020 a plongé le monde littéraire belge dans la sidération. Dans l’hommage de l’académicienne à celui qui l’a accueillie dans la vénérable…
Edmond Vandercammen ou l'architecture du caché (essai d'analyse sémantique)
À propos du livre (texte de l'Avant-propos) Edmond Vandercammen a publié 22 recueils poétiques entre 1924 et 1977, et une quinzaine d'études critiques; il traduisait depuis les années trente les poètes de langue espagnole; il entretenait des contacts personnels et épistolaires avec de nombreuses personnalités du monde culturel et littéraire, était membre de l'Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique. Plusieurs revues lui ont rendu hommage par un numéro spécial et la célèbre collection «Poètes d'aujourd'hui», aux éditions Pierre Seghers, lui a consacré le tome 124. D'autre part, ses uvres, reçues lors de leur parution avec un enthousiasme sincère, comme la presse et sa correspondance en témoignent, n'ont guère trouvé de lecteurs hors du milieu proche de la vie littéraire et n'ont plus été réédités. Les enquêtes réalisées auprès des libraires de Bruxelles nous ont prouvé que ses livres, dans la mesure où ils se trouvent en librairie, n'ont plus d'acheteurs. S'agit-il simplement d'un phénomène général lié à la situation sociale de la poésie d'aujourd'hui, ou bien la poésie d'Edmond Vandercammen fait-elle objet d'un paradoxe, d'une contradiction qui demande une explication? Son uvre, est-elle liée trop étroitement à son temps, et donc périssable, ou bien le dépasse-t-elle au point que seuls quelques initiés et ceux qui étaient proches de lui ont pu mesurer son importance? Jouissait-elle d'une conjoncture littéraire exceptionnelle des années trente ou des années cinquante, conjoncture dont a largement profité la génération née autour de 1900? Toutes ces questions nous ramènent à une constatation et à une réponse d'ordre général : surestimé ou sous-estimé en même temps, Edmond Vandercammen, s'il n'est pas méconnu, est certainement mal connu. Entouré d'amis, de poètes et d'admirateurs, vivant dans un monde paisible et apparemment hors des conflits et des difficultés que connaît notre société, il a pu s'affirmer, s'assurer une estime et une reconnaissance par-fois trop généreuses pour qu'elles puissent comporter aussi un jugement critique. Excepté quelques analyses approfondies. les articles qui lui sont consacrés témoignent avant tout d'une admiration sincère certes, mais qui n'aboutit pas toujours à une appréciation juste de l'uvre. Si notre but est donc de rendre justice à ce poète mal connu. nous devons tenter un jugement objectif. Et ce n'est pas lui faire une faveur spéciale que de souligner avec lui que juge-ment objectif ne veut pas dire jugement froid, «raisonné», contre lequel, pris à la lettre. il s'est clairement prononcé. Cependant, il nous paraît essentiel de tenter ce jugement objectif à travers ses textes poétiques et de montrer ainsi les correspondances entre l'homme et son univers, entre le poète et son oeuvre, entre la poésie et…
Lamartine critique de Chateaubriand dans le Cours familier de littérature
À propos du livre (4e de couverture) Les historiens contemporains des lettres françaises de Belgique tiennent avec raison que La Légende d'Ulenspiegel en est le livre fondateur. Toute fondée qu'elle soit, cette assertion a tardé à prendre forte d'évidence. Lorsque Charles De Coster fait paraître sont livre, en 1867, seuls quelques lecteurs perspicaces y prêtent attention sans parvenir à lui assurer une quelconque reconnaissance. Et c'est aussi pauvre qu'inconnu que l'écrivain meurt en 1879. Il est vrai que «La Jeune Belgique», quinze ans plus tard, reconnaît son rôle, mais le statut de son livre n'en est en rien changé : il a peu de lecteurs, il n'est pas pris au sérieux. Tel n'est pas le cas du jeune Joseph Hanse dont l'Académie royale de langue et de littérature françaises s'empresse, dès 1928, de publier la thèse de doctorat consacrée à Charles De Coster et dont Raymond Trousson écrit aujourd'hui dans sa préface : «Ce coup d'essai était un coup de maître. Soixante-deux ans après sa publication, ce livre demeure fondamental, indispensable à quiconque entreprend d'aborder l'uvre magistrale qu'il mettait en pleine lumière.» Devenu introuvable, enfin réédité aujourd'hui, le Charles De Coster de Joseph Hanse, qui a ouvert la voie à toutes les études ultérieures et internationales sur le sujet, fera figure, pour beaucoup, d'une découverte et d'une…