À PROPOS DE L'AUTEUR
Jean-Claude Pirotte

Auteur de Il y a

Jean-Claude Pirotte est né le 20 octobre 1939 à Namur. Il devient avocat en 1964, à défaut d'autre chose. En 1975, ennuis judiciaires. En 1984, retour au droit, par le plus ignoble des paradoxes, et à Namur, par goût de la fatalité. Ce qui a compté, c'est l'adolescence, les séjours hollandais, les grandes tournées dans les provinces, de Groeninge à Florence ou Malaga, la Bourgogne, les Ardennes, le pinard, les bistrots, l'anonymat des petites villes perdues, les amitiés, aussi. Interrogé sur les événements de sa vie, Pirotte répond qu'il a vécu quelquefois, est mort souvent, et ne se reconnaît guère aujourd'hui dans les existences successives qui encombrent sa mémoire douteuse. Sans doute, il y eut le gamin vagabond qui parcourait la hollande à bicyclette, l'espèce de gigolo démonomane qui fréquentait les zincs de Strasbourg - Saint-Denis, l'adolescent attardé roulant sa bosse dans des provinces perdues de France et d'Espagne, mais après tout, dit-il, ces voyages médiocres ne révèlent qu'une pratique incertaine, celle d'un mauvais art de la fugue, marqué du plus médiocre romanesque. Si j'ai vécu, ajoute-t-il, ce ne peut être que dans les livres, et plus encore dans ceux des autres que dans les miens. À chaque voyage, il faut se reconstruire, tout est à refaire. Une vie, ce n'est pas la somme de vies improbables.Jean-Claude Pirotte s'est éteint à Namur le 24 mai 2014.
NOS EXPERTS EN PARLENT...
Le Carnet et les Instants

Le lecteur qui comme nous, depuis la publication de La pluie à Rethel, aura mis ses pas dans les sillons argileux de l’écriture de Jean-Claude Pirotte, sera sans doute touché par ces derniers mots écrits quelques semaines avant sa disparition en mai 2014. Réunis par les éditions Motus, ces trente-trois quatrains à la facture faussement naïve s’adressent d’abord aux jeunes lecteurs fidèles à la collection Pommes Pirates Papillons. Illustrés par les monotypes du peintre Didier Cros dont l’univers d’ailleurs inspirait l’illustrateur qu’il était aussi, les poèmes de Pirotte rassemblés ici résonnent comme autant de comptines rimées. Trente-trois stations d’une Cavale (La Table ronde, 1999) dont l’ensemble résumerait,…


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Nid

Mon corps est une armoire. Je vis dedans. Quand elles viennent, je voudrais me cacher ailleurs. Je pourrais m’enfuir et elles ne verraient rien, je serais toujours là.  Juxtaposées dans leur écrin blanc et noir, les phrases de Françoise Lison-Leroy ricochent sur les estampes de Pascaline Wollast , également magnétiques et sibyllines, à mi-chemin entre l’énigme et l’évidence. Ce bref récit poétique contient deux parties : « On a changé de pays » et « L’autre nuit » – deux parties qui se présentent comme les rives d’un fleuve, entre lesquelles serpente une histoire millénaire et pourtant toujours neuve. On a changé de pays introduit l’idée d’un mouvement, peut-être une fuite, un départ en tout cas qui bute d’emblée sur les murs d’une étrange maison, dont on ne sait s’il s’agit d’une prison ou d’un centre de soin – voire, de tout autre chose. Mais s’agit-il seulement d’échapper à quelque chose ou quelqu’un ? Peut-être est-il plutôt question de se soustraire aux regards, pour mieux retrouver ses souvenirs et les parfums tactiles du premier nid (ou premier lit) à l’approche du dernier. J’apprends par cœur une langue étrangère et quand je la connaîtrai, je pourrai sortir. Il ne faut pas se lancer dans le vide. Les deux autres, qui dorment à côté, ne parlent pas. Écoute ce silence.  Le premier sous-titre est aussi la première phrase de l’ouvrage, il enclenche le principe de répétition qui ponctue le récit : succession de litanies obsédantes qui participent à piéger l’attention des lecteurs dans la toile tissée par l’autrice. On rencontre alors des hypothèses qui deviennent le réel, «  on part quand on veut mais il faut remplir le formulaire  », des injonctions incongrues, «  je dois leur rapporter le livre de géométrie  », une histoire comme un jeu de plateau à échelle humaine dont le cours n’est pas tant déterminé par les volontés que par les coups de dés. 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