Hèsta : 30 blues wallons

À PROPOS DE L'AUTEUR
Daniel Droixhe (Elmore D)

Auteur de Hèsta : 30 blues wallons

Né à Herstal le 26 avril 1946, Daniel Droixhe est liégeois de souche : des ancêtres houilleurs, limeurs, tourneurs, armuriers (à la F.N., bien sûr), fondeurs l'y ont précédé depuis deux siècles. Son premier don artistique : le dessin, qui lui vaut d'être «directeur artistique» du Trait d'union, le journal de l'athénée (de Herstal) et, plus tard, de voir ses œuvres dans Hara-Kiri. Il changera pourtant bientôt de violon d'Ingres… Ses études de romane accomplies à Liège lui font découvrir Michel Foucault et le structuralisme : son mémoire, qui porte sur «L'arbitraire du signe aux XVIIe et XVIIIe siècles», est préparé en partie à Paris, ce qui lui laisse le loisir de figurer dans le film Le Cerveau. Devenu aspirant au FNRS, il soutient dès 1974 sa thèse La linguistique et l'appel de l'histoire (1600-1800) sous-titrée «Rationalisme et révolutions positivistes», qui paraît chez Droz en 1978 : cet ouvrage suscitera la création d'une Société d'histoire et d'épistémologie des sciences du langage, parce qu'il était temps que se développe, dans le sillage de sa recherche, une histoire de la linguistique. Cette reconnaissance paraît précoce aux yeux de l'institution liégeoise : l'Université n'ouvrant pas d'emblée ses portes au prodige reconnu internationalement, le voilà conservateur-adjoint au Musée de la vie wallonne. Comme le lui dit Marc Wilmet lors de son entrée à l'Académie, «vous vous retrouvez Sisyphe après vous être rêvé Prométhée!». L'ULB, en revanche, lui confie deux enseignements : la dialectologie wallonne et l'histoire de la langue française et de la pensée linguistique. Devenu chercheur qualifié au FNRS, il est demandé dans diverses universités étrangères, à Bochum, à Paris (École pratique des hautes études et École des hautes études en sciences sociales), à Ferrare, à Oxford, à Leyde. Il assure le vaste panorama «Französisch – Externe Sprachgeschichte» au sein du «Lexicon der romanistischen Linguistik». Dans le même temps, il collabore assidûment aux revues de dialectologie wallonne et d'histoire liégeoise : comme le dit toujours Wilmet : «Cette oscillation permanente de l'universel au particulier qui est votre marque de fabrique»… À présent, Daniel Droixhe partage son enseignement entre Liège, Bruxelles et Paris. Mais son violon d'Ingres le mobilise tout autant, se présentant plutôt comme une guitare électrique. Ses premiers enregistrements de rock et de blues wallons, en 1988, sous le nom d'Elmore D., lui ont valu d'être invité au Chicago Blues Festival de Bagneux, et, depuis, les CD se succèdent, qui présentent leur soliste en ces termes : «Voilà un type qui débarque dans votre quotidien morose avec sa voix tonitruante, son slide énergique, sa bonne humeur et qui vous ferait sauter un cul-de-jatte!» Daniel Droixhe a co-fondé en 2004 le Groupe d'étude du dix-huitième siècle de l'Université de Liège et fondé en 2011 la Société wallonne d'étude du dix-huitième siècle - Société associée de la Société internationale d'étude du dix-huitième siècle/International Society for Eighteenth-Century Studies. Voir aussi: Culture, Magazine culturel de l'Université de Liège, n° 1, mars 2009 : «Elmore D, de la dialectologie au blues d'aujourd'hui» Culture, Magazine culturel de l'Université de Liège, «Écrivains de l'ULg»

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Tchansons d’one miète pus lon. Chansons d’un peu plus loin

Les membres de la Société de langue et de littérature wallonnes, qui reçoivent ses publications ordinaires avant même qu’elles n’arrivent en librairie, auront certainement remarqué l’évolution de sa plus vaste collection, « Littérature dialectale d’aujourd’hui ». Au-delà du travail innovant réalisé sur les maquettes, il convient d’observer une inflexion dans le choix des textes : alors que, depuis une bonne décennie, elle proposait des œuvres d’écrivains confirmés — et parfois même des rééditions — voilà qu’ont paru coup sur coup deux premiers recueils. Si Al cwène dès djoûs de Jean Collette , qui réunit plusieurs suites de poèmes, semblait déjà une œuvre de maturité, ces Tchansons d’one miète pus lon marquent l’entrée en littérature d’un nouveau talent, par ailleurs l’un des cadets de la Société. (Qui se souvient que la « petite collection », comme elle est souvent appelée, fut composée à l’origine de plaquettes se réjouira certainement qu’elle joue à nouveau ce rôle de vivier.) Dire que Xavier Bernier est talentueux semble un euphémisme. Il appartient à une nouvelle génération de wallonophones qui, faute de l’avoir appris de jeunesse, ont dû prendre leur idiome à bras-le-corps, en interrogeant sans relâche des parents et en disséquant les meilleurs auteurs (ces chansons sont dédiées à la mémoire de deux maitres, Émile Gilliard et Auguste Laloux). L’on a peine à le croire tant il déploie une langue riche et précise, qui puise directement aux images et aux sonorités du parler de Crupet. Leur lecture rassurera certainement les amateurs quant aux capacités de régénération des lettres wallonnes, qui vivent une période charnière.Mais en miroir — il faut le reconnaitre — la rencontre d’un texte si exigeant peut faire craindre la pénurie de lecteurs. En effet, en dépit des efforts de l’éditeur, qui propose un rappel des principes de transcription Feller, une traduction française en vis-à-vis et cinq pages ramassées de notes et de glossaire, ce type d’œuvre reste difficile d’accès pour un public qui ne possède pas entièrement son wallon. Car si la version française restitue le sens, elle perd certaines allitérations, certains enjambements : Quèwéye d’aveûles au bwârd do trau Onk qui sît l’ôte, tot fiant come s’i Crwêreut qu’i veut pus clér qui li Waîte bin l’ bèle binde di laîds bâbaus ! [File d’aveugles au bord du gouffre / L’un suit l’autre en faisant mine / De croire qu’il voit mieux que lui / Belle bande d’idiots !] Et il en va de même pour les idiotismes, généralement intraduisibles. Dire que le piche-è-l’aye est désinvolte semble trop faible : il est en fait « pisse à la haie ». De même pour le tape-à-gaye (le gauleur de noix, qui frappe au petit bonheur la chance) et le tchîye-à-pouf (le « chie au hasard »), qui perdent aussi de leur saveur. C’èst mi qu’èst piche-è-l’aye Tape-à-gaye Tchîye-à-pouf C’èst vos, m’ fi, qu’èrite do bouzouf ! [Je suis désinvolte / Imprévoyant / Foireux / C’est toi, mon gars, qui hérites du bordel !] Ces deux extraits font entrevoir un thème important du recueil, à savoir les limites planétaires et la critique de l’individualisme. Xavier Bernier est en effet un auteur engagé, qui dénonce aussi la « Forteresse Europe » et la fast-fashion . Il est intéressant d’observer que, ce faisant, il renoue avec une tradition centenaire de la littérature en langue wallonne, qui a souvent — et notamment dans ses débuts moralistes — prêché le principe de l’égalité de tous devant les drames. Comme Nicolas Defrecheux a pu dire, dans des vers réédités à l’occasion de la dernière Fureur de lire , «  Qui t’ plèce so l’ monde seûye basse ou hôte, lès måleûrs todi t’ac’sûront  » [«  Que ta place sur le monde soit basse ou haute, les malheurs t’atteindront toujours  »]. Xavier Bernier tance le consommateur irresponsable : Ti t’ pous bin mète à djok su t’ twèt Ou d’djà ataquè à couru Gn’a pus qu’ deûs maniéres di moru Si ti n’ néyes nin, ti crèverès d’ swè [Tu peux te percher sur ton toit / Ou déjà commencer à courir / Il n’y a plus que deux manières de mourir / Si tu ne te noies pas, tu crèveras de soif] Est-ce à dire qu’il se place dans l’exacte continuité d’écrivains qui, avant lui, ont exalté en wallon la vie simple et la sagesse populaire ? Du tout. Il cherche plutôt sa propre voix, entre émerveillement du quotidien et solidarité par-delà les frontières, y compris les frontières taxonomiques. Mi, dji n’è vou nin, d’ vos racènes Èt dji n’ vou nin d’meurè stitchi Tot tchantant, mès pîds dins l’ansène Ou dins l’ crausse aurzîye do pachi [Je n’en veux pas, de tes racines / Et je ne veux pas rester fixé / Chantant, les pieds dans le fumier / Ou dans l’argile grasse du verger] Le meilleur exemple est sa Tchanson po lès mouchons , qui reprend un air traditionnel quelque peu carnassier. Mais, sous sa plume, « Dj’ê stî al tchèsse aus p’tits mouchons / Dj’ènn’ ê tuwè pus d’on million » [ « J’ai été à la chasse aux petits oiseaux / J’en ai tué plus d’un million » ] devient… Avoz choûtè lès p’tits mouchons Qui tchantenut chaque si p’tite tchanson ? [ As-tu écouté les petits oiseaux / Qui chantent chacun sa petite chanson ? ]Gageons que c’est grâce à de nouveaux bardes comme lui « Qui l’ môde va d’abôrd riv’nu do tchantè è walon / Èt r’chuflè dès-aîrs do timps d’ nos ratayons » [ « Que chanter wallon reviendra à la mode / Tout comme siffler des airs anciens » ]. Julien Noël Les traductions offertes ici sont les adaptations littéraires de l’auteur. Plus d’information Aves ces Tchansons d’one miète pus lon , Xavier Bernier se sert des mots percutants et des images fortes du wallon namurois pour explorer les questions du présent. Europe-forteresse, dérèglement climatique, mais aussi émerveillement devant la beauté, attachement à l’enfance, vie amoureuse… L’auteur envisage ces thèmes universels en puisant aux sources les plus locales (La Marie Doudouye) comme les plus exotiques (Cesária Évora ou Antonio Carlos Jobim). Ce recueil captivant, qui célèbre la diversité et l’héritage, et où chaque terme est choisi pour sa sonorité ou son rythme, est un appel à résister à l’uniformisation…