Ce premier livre en français sur l’œuvre de Crepax offre l’occasion à l’autrice de renouer le fil entre audace graphique, avant-gardisme et érotisme en tant qu’expérimentation de l’identité sexuelle. Premier livre en français qui interroge l’œuvre du dessinateur italien de bande dessinée Guido Crepax (1933-2003), cet essai questionne les révolutions graphiques et narratives qu’il introduit, l’avant-gardisme de ses créations, ses personnages féminins dont la mythique Valentina. Il déploie l’érotisme crépaxien à travers ses adaptations d’Histoire d’O., de Justine de Sade, d’Emmanuelle… et rend compte de la manière dont l’érotisme est vu comme le laboratoire d’une réflexion sur l’identité, le règne des images et le royaume de la sexualité en ses explorations illimitées.
Autrice de Guido Crepax : L’axiome d’Eros
Véronique BERGEN, Guido Crepax. L’axiome d’Eros, La Lettre volée, 2023, 140 p., 18 €, ISBN : 9782873176167Bien sûr, il y a son Emmanuelle – premier frisson, ces jambes pendantes, devant l’osier d’un fauteuil démentiel où elle trône en reine désabusée – et son Histoire d’O – deuxième frisson, cette silhouette nue et aveugle attirée en laisse par un laquais sordide vers quel vertige ? Deux sommets de ce que l’on hésite à qualifier de « bande dessinée érotique » et qui mérite mieux son appellation de Neuvième art. Mais Guido Crepax (1933-2003), c’est bien plus que Réage ou Arsan couchées, détaillées et encrées en noir et blanc dans des albums qui firent les délices interdites de plusieurs générations…
Vienne, 1907. Le peintre Gustav Klimt rend visite aux époux Bloch-Bauer. Ferdinand demande alors à Gustav de réaliser le portrait de sa femme, Adèle ; requête entraînant un flashback. Six ans auparavant, alors que Klimt essuyait des critiques acerbes au sujet de son œuvre La Médecine , il a rencontré ce couple, admirateur de son génie et dont la femme l’a prié de lui ouvrir les portes de son atelier. Au même moment, l’artiste recevait en rêve l’inspiration pour son prochain tableau. C’est par ce prisme que l’on entre dans l’univers de l’artiste : son atelier, ses modèles, sa mère, sa compagne, Émilie, mais aussi ses rêves, ses angoisses, ses sources d’inspiration en somme. L’histoire narrée en bande dessinée par Cornette et Marc-Renier est une tranche de vie, prétexte à l’évocation du peintre, de son style, de son époque et de l’avant-gardisme dont il y faisait preuve. L’idée est en effet plus de mettre en avant ses particularités que de réaliser sa biographie. Le récit est assez simple et aurait peu d’intérêt sans l’aspect « inspiré de faits réels », mais n’en est pas moins cohérent et bien rythmé.Les dessins sont soigneusement détaillés. Le rendu est classique, avec un crayonné assez fort accentuant les sujets principaux. Les travaux de Klimt évoqués sont réinterprétés plutôt que cités et le résultat est réussi et efficace : le redesign des œuvres permet une intégration fluide dans les cases tout en invitant à les découvrir sous un angle neuf.Le récit principal est suivi d’un court cahier didactique sur Gustav Klimt. Il complète la bande dessinée en développant quelques sujets qu’elle évoque. On y voit notamment des reproductions des œuvres évoquées dans l’album. Ainsi, le lecteur a à portée de main de quoi satisfaire sa curiosité, titillée par l’histoire racontée en images et phylactères.La bande dessinée Klimt est une introduction sympathique à l’œuvre de l’artiste. Les connaisseurs n’apprendront probablement pas grand-chose, là où les néophytes apprécieront l’accessibilité du propos et les informations proposées en fin d’ouvrage. Les visuels soignés plairont aux amateurs de bande dessinée traditionnelle, alors que l’histoire…