La singularité de l’œuvre poétique de Harry Szpilmann tient à ceci : elle s’accompagne à chaque instant de ses avancées d’une réflexion sur la poésie qui anime ses textes en profondeur. Et cette approche exprime une volonté irréductible de vouloir percer les opacités du monde à la fois sous la forme et par la langue poétique au sens stricte de terme, et par l’utilisation dissimulée, ici, mise au jour, là, de l’aphorisme, c’est-à-dire une volonté de mettre en exergue quelque certitudes infiniment questionnées dans leurs fondements, mais saisie sous une forme brève, incisive, non moins qu’impérieuse. Il y a chez lui quelque chose d’une urgence, ou mieux, d’une rage d’écrire qui n’incarne pas moins une rage de vivre. Chaque poème, jamais fermé sur lui-même, témoigne d’une expérience, ce qui ne lui interdit en aucune manière, bien au contraire, de dialoguer avec elle-même. Genèse et magmas, nous avertit l’auteur, « est traversé de part en part par une même problématique, à savoir la question du poétique. » Et il ajoute : « Ne prétendant nullement y apporter de réponse univoque et moins encore définitive, notre office, essentiellement, aura consisté à demeurer au plus proche de l’ouverture suscitée par la question, en habiter la source, et l’avoir absorbée dans la multiplicité des voix qui devraient naître du sortilège. » Se tenant à proximité des choses et de la vie, l’auteur accorde une écoute impérieuse à l’infini variété des inattendus, des événements, tout ce qui obligent à réorienter la vie, sa vie ; et à la permanence du désir, cette limpidité de la soif qui accompagne « la promesse du poème à venir », nous dit-il. Cette poésie est une véritable féérie où les significations de ce qui se tient à la marge et qui revient au cœur de ce que nous sommes afin de donner pleine existence à nos interrogations.
Auteur de Genèse et magmas I