Image de l'oeuvre - Nuit de chance

Notre critique de Nuit de chance

Nuit de chance de Sarah Cheveau appartient à un espace-temps bien particulier. On entre dans ce livre comme dans une forêt feutrée, aux essences et aux senteurs particulières d’écorces, de feuilles fraîches, d’humus. Notre œil se fraye un chemin à travers les densités de fusain. Des détails apparaissent, comme à travers une paire de jumelles : le bout d’une branche, la cime d’un arbre, des brindilles dans le vent… Peu à peu la focale s'agrandit et la forêt nous révèle ses zones d’ombre, ses mystères et son écosystème. On aura la chance d'y croiser des habitants à quatre pattes et de plus en plus imposants: un écureuil, un lièvre, un renard, un chevreuil, jusqu’à la rencontre finale…

Quelles relations entretient-on avec les forêts, les zones boisées, les haies et les talus? Quelles histoires se raconte-t-on quand on marche sous les branches ? Quelles aventures vit-on dans ces espaces quand on est enfant, et adulte ?

En lisant le livre d'un peu trop près on pourrait presque se retrouver avec le bout du nez charbonné tant la matérialité des fusains est palpable. C’est une plongée visuelle dans la matière. On sent le feu, le brûlé, la fumée. Les essences de bois révèlent leur gamme brune, ocre, marron, beige ou cendrée.

Sarah Cheveau revient à des outils primaires, essentiels. Des branches qu'elle collecte et qu’elle transforme en charbon. En nous révélant le secret de fabrication, elle nous encourage nous-mêmes à partir en balade et ramasser des trésors dans les bois pour dessiner nos propres aventures !

La dernière partie de Nuit de chance est une boîte à outils. Une collection de morceaux de charbon à dessin, un herbier de feuilles d’arbres pour apprendre à reconnaître les végétaux de nos régions et une palette de couleurs poétique. Quelques pages pour s’attarder sur les détails de cette nature à laquelle on n’accorde pas toujours l’attention qu’elle mérite, sur les richesses qu’elle permet et sur les dialogues que l’on peut nouer avec elle.

La nuit et la forêt réunies. A priori le décor idéal pour cauchemarder en beauté ! Mais Nuit de chance est un livre pour apprivoiser ses peurs et pour faire découvrir aux plus jeunes que l’obscurité n’est pas aussi opaque que ce que l’on croit. En y regardant de plus près et en avançant avec confiance, on peut faire de belles rencontres et apprivoiser les formes les plus impressionnantes !

Un livre à découvrir dès 4 ans.

Pauline Rivière