Image de l'oeuvre - Les sources mêlées

Notre critique de Les sources mêlées

La première est scénariste et autrice de romans, la seconde est illustratrice, diplômée de l’Institut Saint-Luc de Bruxelles. Ensemble, Aurélie Jeannin et Julie Hoyas nous proposent de plonger dans leur nouvel album à destination de la jeunesse : Les sources mêlées, aux éditions Athizes.

Passé la très belle et douce couverture de l’album, le duo nous emmène dans un univers singulier. Un monde fait de grandes illustrations qui couvrent les doubles pages du livre.

En ce lieu existe une tradition millénaire, dont on ne sait d’où elle provient : chaque enfant, lorsqu’il naît, reçoit de sa mère une goutte, qu’elle accroche tel un bijou au cou du nouveau-né. Chaque bijou est unique. Il rappelle à l’enfant la valeur du vivant. Il doit en prendre soin, ne pas s’en séparer, défendre sa goutte comme il défend le monde qui l’entoure.

C’est dans ce monde que naît Rose. La petite fille grandit dans un univers de nature et de joie. Elle boit l’eau aux sources des rivières. Elle cueille les fruits dont elle se fait un repas. La vie semble bien douce.

Et pourtant, comme attendu, toute histoire à son point de déséquilibre. Un jour, sans le voir venir, la fillette se rend compte que le monde n’est plus aussi verdoyant qu’elle le croyait. Un matin, les habitants se lèvent et découvrent un monde de crevasses, d’assèchement. Les arbres et les animaux se font plus rares. Et dès lors, les grandes images aux tons bleus et verts de Julie Hoyas, qui rappelaient la douceur et la couleur de l’eau, laissent place à un décor orangé, aride et sec, un soleil plombant et de la nature absente.

Alors que faire, face à l’inattendu ? Il n’y a qu’une seule solution. Elle déchire les cœurs. Chacun offre la goutte qui est suspendue à son cou pour recréer la vie. L’abandon collectif de ce bijou de paraître signe le retour de la luxuriance. La fable est légèrement attendue. L’individu offre son privilège individuel dans l’espoir qu’il soit la solution au problème collectif. La morale est belle, quoiqu’un peu simple. C’est un appel à l’effort individuel dans le drame écologique collectif.

Chaque adulte, chaque enfant, offre donc son confort et son paraître à un bien plus essentiel, la nature. Et de cette page orangée et aride revient la douceur préalable. On retrouve la vigueur du vivant.

Si le scénario et ses ressorts sont évidents et provoquent peu de surprises, on se plaît tout de même à naviguer dans cet univers insolite. Les illustrations de Julie Hoyas y sont pour beaucoup. Quelle maîtrise de la couleur pour raconter le monde. On en prend plein les yeux à tourner les pages à la gouache de l’illustratrice. En s’appropriant le scénario d’Aurélie Jeannin, elle donne à voir ce qui pourrait être des tableaux, qui fonctionnent indépendamment l’un de l’autre.

Vous l’aurez compris, ce qui me séduit à cette lecture, c’est surtout une narration graphique, que je trouve lumineuse. Ces grandes illustrations nous emmènent dans un ailleurs. Julie Hoyas nous capte et nous captive.

Alors, si vous aimez les belles images, la douceur de l’illustration et les morales qui font du bien, qu’attendez-vous ?

Clément Fourrey