Souvent invisibilisées ou effacées de l’histoire, les femmes sont les oubliées de nos récits collectifs. Il en va de même en ce qui concerne la mythologie. L’erreur trouve ici une partie de sa réparation. Avec Femmes d’Asgard, scénarisé et dessiné par Ani, on redécouvre la mythologie nordique d’un autre regard.
Alors, on oublie quelques instants Thor, Loki et Odin. Ou tout du moins, on leur demande un pas de côté. Ceci nous permet de mettre en lumière une vingtaine de déesses et autres héroïnes mythiques du Danemark, de Suède ou de Norvège.
Saviez-vous qui permet au soleil d’effectuer sa course ? Ou qui gère les destinées tant des hommes que des dieux ? Ce sont évidemment des femmes. Ce documentaire nous fait donc découvrir les destinées de Frigg, des Valkyries, de Freya et de Sif, tout ceci dans des textes abordables et ludiques. On peut donc dès le plus jeune âge (7 ans) plonger dans l’univers merveilleux des légendes nordiques. En créant ce panthéon, Ani permet aux plus jeunes de s’identifier à des figures féminines fortes et indépendantes. Elle permet aussi de relativiser l’importance de l’homme dans les mythes fondateurs de nos sociétés. On se rend dès lors compte que les femmes vikings étaient bien plus nombreuses que ce que l’on croit, que les panthéons mythiques accordent une place aux figures féminines et que d’importantes parts des légendes n’auraient pas lieu sans celles-ci.
Au-delà des textes et du fond, qui sont un petit plaisir de lecture, on retient surtout une illustration qui fait du bien aux yeux. Son style assumé, fait des rondeurs et de brisures, propose un parti pris très intéressant. On sent le soin apporté à celles-ci avec une belle dose de sensibilité. Ces parfaites illustrations nous plongent dans les récits avec justesse. Avec une forme graphique qui permet au fond d’être mis en lumière, Ani réussit un très bon livre et touche son ou sa lectrice.
Avec un doctorat en histoire de l’art et archéologie à l’Université Libre de Bruxelles, on sent que l’artiste est en totale maîtrise de ses sujets, tant graphiques, qu’historiques. Elle nous transmet donc, sous un autre médium, ses recherches fondées sur la perception du genre dans les sociétés médiévales. Mais le talent de la chercheuse ne s’arrête pas là, ni à l’illustration d’ailleurs, un petit tour sur son compte Instagram, nous la présente aussi tatoueuse. Avec son style très épuré et très graphique, on est donc pris d’une belle envie de lire. Les couleurs amènent de l’énergie à l’ensemble. L’album est donc en tout point une réussite.
Qu’attendez-vous pour voyager vers Asgard ?
Clément Fourrey