Michel Duchatto est né à Herstal en 1897 au sein d’une famille de militants socialistes. Son père est d’ailleurs le premier bourgmestre socialiste nommé dans la commune, en 1919.
Auteur très précoce, Michel Duchatto a à peine 12 ans lorsqu’il envoie ses premiers textes à Lucien Colson, auteur liégeois, qui s’empresse de les publier dans Li Clabot et dans Le Foyer populaire, deux journaux dialectaux liégeois. Dès 17 ans, il produit sa première revue en trois actes pour le théâtre : Måle linwe, va !
La guerre de 1914-1918 l’empêche de pouvoir continuer ses études et il embrasse une carrière d’employé dans la société de pneumatique Englebert, et d’éditorialiste. Il propose ses rubriques au Journal de Liège, à Noss’ pèron et bientôt à La Wallonie. Il y traite principalement de théâtre et de littérature wallonnes, et fait office de critique littéraire dans des papiers très appréciés. Il signe parfois ses articles du pseudonyme Jean Populaire ou de l’appellation Fré Mitchî.
Dès 1924, à la demande du directeur du Pavillon de Flore, il s’associe avec son confrère Théo Beauduin, journaliste, pour produire des revues et des pièces de théâtre. Ils parviennent à renouveler le genre. Ils connaissent bien le théâtre français, qu’ils adaptent souvent avec brio. Leur théâtre, profondément social, est plus attentif aux caractères et aux réactions psychologiques individuelles de leurs personnages. Ils écrivent ensemble 14 pièces et 22 actes de revues, qui sont joués et repris maintes fois. Leur chef d’œuvre commun est Tchantchès, une épopée lyrique qui s’inspire largement du Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand, sans pour autant le copier ou le caricaturer. Ils parviennent à faire de Tchantchès un héros bien vivant et éloquent. Le public et les amateurs ne s’y trompent pas puisque la pièce est récompensée d’une médaille d’or par la Société de langue et de littérature wallonnes.
Le décès de Théo Beauduin en 1932 coïncide avec une mutation professionnelle de Duchatto à Paris. Il y assure notamment la version française de Englebert Magazine. Il continue pourtant à contribuer aux journaux locaux, en qualité de correspondant étranger, et de produire des pièces de théâtre représentées par les troupes liégeoises.
Durant la guerre de 1940-1945, son père, alors bourgmestre de Herstal est pris en otage et meurt en captivité à la citadelle de Huy. Michel Duchatto en demeurera profondément marqué pour le reste de sa vie.
À la fin de la guerre, il est de retour en région liégeoise. Il continue à produire des pièces marquantes : L’åbion (1947), Li magot d’a Matile (1950) et d’autres.
En 1946, il devient membre titulaire de la Société de langue et de littérature wallonnes, dont il assumera la présidence à trois reprises. Parallèlement, il mène une carrière politique, devenant conseiller provincial socialiste entre 1949 et 1971, puis conseiller communal socialiste — et bientôt chef de groupe, entre 1953 et 1971. Militant pour le régionalisme, il ne cesse de réclamer, lors de conférences ou de débats, une décentralisation économique en Belgique.
La fin de sa carrière littéraire est principalement faite d’adaptations. D’une part, il adapte des textes anglais à la scène en français, notamment pour le compte du théâtre du Gymnase à Liège. C’est le cas pour Dix petits nègres ou Café noir d’Agatha Christie. D’autre part, il adapte de nombreuses pièces françaises vers le théâtre en wallon. La plus mémorable d’entre elles est Electre, inspirée de la pièce écrite par Giraudoux à partir de l’œuvre de Sophocle. Sa représentation avec Jenny d’Inverno dans le rôle principal, marque complètement les esprits et suscite des vocations parmi les auteurs et les acteurs wallons.
In-ome èl trape (1960) reprise de Piège pour un homme seul de Robert Thomas, demeure tout aussi marquante dans l’esprit du théâtre wallon. On citera également Li djeû dès qwate fils Aymon qu’il reprend du ballet Les quatre fils Aymon de Herman Closson et Maurice Béjart.
Il décède en juillet 1975, provoquant l’émoi dans tous les milieux qu’il a fréquentés.
En son hommage, la Province de Liège a créé, au sein de ses rencontres provinciales de théâtre dialectal, un prix Michel Duchatto, destiné à récompenser la plus forte personnalité dramatique lors de chaque saison.