Jules Claskin est né à Grivegnée le 8 octobre 1886. Malgré une enfance rude, durant laquelle ses parents se désintéressent totalement de lui, il entre à l’Académie des Beaux-Arts à Liège où il apprend le dessin, la peinture et la sculpture. Il s’illustre dans ces trois genres, mais privilégie bientôt la sculpture sur bois, dont il fait sa profession.
Parallèlement, il vient à la littérature en autodidacte. Il se forge un solide bagage intellectuel, et tout spécialement dans le domaine de la littérature wallonne, qui a sa préférence. Dès la fin des années 1900, il participe à des cabarets wallons, où il se produit. Il compose ses premiers écrits, essentiellement des chansons.
Lorsque la guerre de 1914 survient, et bien qu’il ne soit pas mobilisé, il s’engage comme volontaire sur le front de l’Yser. Là, il connaît la camaraderie des tranchées, il écrit des pasquèyes et des poésies, il contribue largement à un journal du front nommé Amon nos-autes. Mais il vit également les difficultés des tranchées et est gazé, lors d’une attaque. Lorsqu’il revient en 1918, ses poumons sont atteints et il est reconnu invalide.
Il reprend malgré tout son métier de sculpteur et s’engage plus que jamais dans les cabarets wallons, devenant une figure incontournable aux côtés des Louis Lagauche, Auguste Boon, Victor Vincent, Armand Ledoux et Joseph Duysenx. Il y produit ses textes et chansons les plus célèbres, les plus amusants sans aucun doute, les plus caustiques parfois.
Et, à côté de ce côté populaire, célébré par ses contemporains, Jules Claskin écrit le meilleur sans oser pour autant le publier : une poésie wallonne qui est moderne, qui ouvre la voie de l’impressionnisme. Cette poésie est synthétique, sobre, le vers libre s’y développe, la rendant souple et efficace. On ne découvrira cette facette secrète de l’auteur qu’à l’heureuse initiative du professeur Maurice Piron qui édite et publie ses Airs di flûte, à titre posthume, en 1956.
Après avoir sollicité et obtenu un emploi de bibliothécaire à la ville de Liège, après avoir mis sur pied des outils stylistiques comme un traité de versification et un dictionnaire de rimes, Jules Claskin décède à 40 ans à peine, en ayant réussi l’incroyable prouesse d’obtenir les faveurs de ses contemporains au cabaret, tout en laissant le meilleur de sa composition à la postérité.