Tif et Tondu (tome 16) : L’ombre sans corps

À PROPOS DES AUTEURS
Maurice Tillieux

Auteur de Tif et Tondu (tome 16) : L’ombre sans corps

Scénariste et dessinateur, Maurice Tilleux est né à Huy (en région Liégeoise) le 07 aout 1921. Auteur incontournable du Journal de Spirou du milieu des années 50 jusqu’à son décès prématuré en 1978, Maurice Tilleux a marqué le monde de la bande dessinée franco-belge en créant des personnages comme Félix, César et bien entendu le détective privé Gil Jourdan. Si de nos jours Maurice Tillieux est considéré comme un auteur phare de la bande dessinée, c’est toutefois en tant que romancier qu’il débute sa carrière. Amateur de récits policiers, il publie, en 1943, Le Navire qui tue ses capitaines (éd. Le Sphynx), un récit inspiré par un fait divers dont il avait eu vent enfant. S’ensuivent l’écriture de deux autres histoires, L’Homme qui s’assassina (1944) et les Aventures de Paillasson (1945) qui ne trouvent malheureusement pas d’éditeur et qui décident Tillieux à ne finalement pas s’engager davantage dans le métier de romancier. Tillieux se lance dans la réalisation d’affiches promotionnelles, puis  se tourne vers la bande dessinée. À partir de 1944, il rejoint les rédactions de revues de bande dessinées comme Bimbo et Jeep, pour lesquels il réalise bon nombre de planches. Mais c’est son entrée au sein du magazine Heroïc-Albums en 1947 qui lui permet de développer ses talents de dessinateur et de scénariste. Il crée, en 1949, le personnage de Félix, un jeune détective intrépide qu’il met en scène pour la première fois dans l’aventure La Turquoise Creuse. Sous la plume de Tillieux, le jeune Félix vit plus d’une soixantaine d’aventures à travers le monde, accompagné par le personnage de Fil-de-Zinc, puis par le loufoque Allume-Gaz et l’inspecteur Alonzo Cabarez. Lorsqu’en 1955 s’interrompt la publication du magazine Héroïc-Albums, Maurice Tillieux rejoint les rangs des éditions Dupuis. Il s’agit pour lui d’une petite victoire car ses précédentes tentatives afin d’intégrer cette prestigieuse maison d’édition se sont, jusqu’alors, soldées par des échecs (à l’exception de quelques illustrations qu’il parvient à placer dans le Journal de Spirou durant la guerre). Il travaille, dans un premier temps, à la rédaction de l’éphémère journal Risque-Tout (éd. Dupuis, 1955-1956) pour lequel il propose les aventures du photographe Marc Jaguar. Cette série, qui ne comporte qu’un seul album, est abruptement interrompue avec l’arrêt du Risque-Tout. Elle connait tout de même une conclusion, en 1976 dans le Journal de Spirou. Après son passage éclair chez Risque-Tout, Tillieux est finalement engagé au sein du Journal de Spirou. Il envisage, un temps, de reprendre les aventures de Félix mais, conscient que le journal cherche à proposer de nouveaux contenus à son lectorat, il décide de ruser. Il recycle ainsi les personnages et les scénarii des Aventures de Félix pour créer les aventures du personnage de Gil Jourdan, un jeune licencié en droit devenu détective privé. Flegmatique et pince-sans-rire, Gil Jourdan est une réadaptation évidente du personnage de Félix. Il est d’ailleurs accompagné dans ses enquêtes par l’ancien cambrioleur Libellule (ré-imaginé à partir du personnage d’Allume-Gaz), par l’Inspecteur Crouton (refonte burlesque de l’Inspecteur Cabarez) et par la truculente Queue-de-Cerise, l’assistante de Gil Jourdan, inspirée du personnage de Linda (apparue dans les dernières aventures de Félix). La première aventure de Gil Jourdan, Libellule s’évade, est prépubliée en 1956 dans Le Journal de Spirou et rencontre un franc succès auprès des lecteurs et lectrices du journal. Cette histoire pose d’entrée de jeu, les bases de ce que va devenir la série : des histoires policières palpitantes, teintées d’humour et d’un brin de fantastique. Dans la foulée, Tillieux réalise Popaïne et Vieux Tableaux, une aventure traitant de trafic de drogue, réadaptée d’une histoire de Félix, Trafic de Coco publiée en 1944. Tout le talent narratif de Tillieux, son sens du dialogue et sa capacité à mettre en scène des personnages savoureux dans des ambiances criantes de réalisme se retrouvent particulièrement dans la troisième aventure de Gil Jourdan La Voiture Immergée (1958). Considérée comme l’un des albums les plus aboutis de l’auteur, La Voiture Immergée est une histoire pleine de rebondissements et de scènes d’actions mémorables. Le tout dans une atmosphère de port breton parfaitement retranscrite en dessin. En plus d’être passionné de récits policiers, Tillieux est également grand amateur de mécanique automobile. Il prend donc un malin plaisir à truffer chacun de ses albums de voitures et de véhicules en tout genre, dessinés avec un certain sens du détail (à l’image de la Renault Dauphine rouge conduite par Gil Jourdan) et qu’il s’amuse ensuite à détruire lors d’accidents plus spectaculaires les uns que les autres. En 1960, désireux d’explorer d’autres registres, Tillieux s’essaye à l’humour en créant César et Ernestine, une série de gags relatant le quotidien d’un dessinateur devant s’occuper de sa petite voisine turbulente. Puis, au fil des années 60, lassé du dessin, il s’en éloigne petit à petit  pour se consacrer pleinement à la scénarisation. Il crée la série humoristique Marc Lebut et son voisin (1968) avec le dessinateur Francis, puis revient au genre policier en imaginant le personnage de Jess Long (1969) sous la plume d’Arthur Piroton. En 1973, Maurice Tillieux délègue la réalisation des dessins de Gil Jourdan au dessinateur Gos (Le Scrameustache) qui reprend la série à partir de l’album Carats en Vrac. Dans le même temps, il s’illustre en scénarisant de nombreuses séries populaires comme Tif et Tondu (avec le dessinateur Will), Natacha, hôtesse de l’Air (Walthéry) ou encore La Ribambelle ou Boule et Bill (Roba). Considéré pour reprendre le scénario des Aventures de Lucky Luke quelque temps après la disparition de Goscinny, Maurice Tillieux est malheureusement victime d’un accident de la route le 2 février 1978, du côté de la ville de Tours (région Centre-Val de Loire). Il lègue au monde de la bande dessinée une œuvre de qualité indéniable, peuplée de personnages hauts en couleur, évoluant dans des décors pleins de justesse et de précision.
Willy Maltaite (Will)

Illustrateur de Tif et Tondu (tome 16) : L’ombre sans corps

Né le 30 octobre 1927 à Anthée en Belgique sous le nom de Willy Maltaite pour l'état civil. WILL accumule les dessins en marge d'une scolarité dilettante et tâte assidûment le pinceau. Sensibles à cette vocation artistique, ses parents l'inscrivent à l'école Saint-Joseph de Maredsous, mais il rate son examen d'admission. Alors, il "monte" à Dinant et rencontre un prof de dessin qui l'oriente vers Joseph Gillain, un jeune artiste dessinant des "petits miquets" pour "Spirou". C'est l'aube d'une grande amitié et Will, âgé de 14 ans, découvre la magie virtuelle de la matière et le pouvoir évocateur d'une ombre, d'une teinte, d'une courbe. La verdoyante vallée mosane, le ciel azuré de Cassis, un être ou un objet, tout est sujet à études picturales, tout est substance pour la suggestion sculpturale. C'est l'éveil d'une vocation profonde, c'est l'école du talent. En 1946, s'amorce l'époque glorieuse et folle de Waterloo. Outre WILL, Joseph Gillain héberge Franquin et Morris, deux jeunes farfelus formés chez "CBA", le studio d'animation dirigé par Paul Nagant. Epaté par la verve des ses nouveaux compagnons, WILL aborde le cartoon et l'illustration. L'ambiance de l'atelier est exceptionnelle, les virées amicales sont inoubliables. Ses premières oeuvres sont publiées dans "Bonnes Soirées" et "Le Moustique". Dès lors, la perspective de réaliser, à son tour, une bande dessinée séduit ce doux rêveur à l'aurore de sa majorité. Tandis que Franquin, Jijé et Morris sont en Amérique, WILL ébauche "Le mystère du Bambochal" d'après un scénario de Haché. Parallèlement, il fait quelques "pubs" à la World Press où bossent Hubinon, Charlier et Weinberg. Terminé, son péché de jeunesse est refusé par les Éditions Dupuis. Peu importe, avec la complicité d'un cousin imprimeur, il fonde les "Editions du Ménestrel" et publie artisanalement 15.000 exemplaires de son premier album en 1949. Après de nombreuses illustrations, il entre chez SPIROU en 1947 et reprend "Tif et Tondu" en 1948. Son style incite Charles Dupuis à lui proposer la tutelle de Tif et Tondu, le célèbre duo d'aventuriers créé par Fernand Dineur en 1938. WILL accepte et, sans trahir la vigilance de Dineur, dessine "Le mystère de Beersel", (1948/49), un épisode inédit dans "Spirou". "La cité des rubis", "La revanche d'Arsène Rupin", "San Salvador", "Le fantôme des lagunes" et "La villa sans souci", illustrent leur étroite collaboration. Puis Fernand Dineur ayant cédé ses droits aux Editions Dupuis, Luc Bermar (Henri Gillain) et Albert Desprechins écrivent respectivement "Le trésor d'Alaric" et "Oscar et ses mystères". En 1954, WILL rencontre Maurice Rosy. Ensemble, ils imaginent "Monsieur Choc", un cerveau diabolique capable d'imposer sa volonté au monde grâce à sa phénoménale intelligence. Mystérieux, omniprésent, insaisissable, Choc marque les pages de "Tif et Tondu contre la main blanche" et impose son élégance glacée dès l'épisode suivant : "Le retour de Choc". Habile métaphore du mal, l'heaume de Choc fascine; ses yeux sans visage scrutent notre imaginaire et sondent nos référents culturels. Fantomas et le Docteur Mabuse ne sont plus les seuls génies du mal. Il a été directeur artistique du journal Tintin de 1958 à 1960. En plus de 40 albums de "Tif et Tondu" de 1954 à 1991, WILL sera l'un des rares transferts entre l'école de Marcinelle (SPIROU) et celle de Bruxelles (TINTIN). Il a été également DIRECTEUR DE COLLECTION DU CARROUSEL CHEZ DUPUIS DE 1966 A 1969. Mais en 1968, Rosy, débordé de travail, déclare forfait. Maurice Tillieux, à la demande de WILL, assure la relève du scénario de Tif et Tondu avec "L'ombre sans corps" et oriente cette saga vers le suspense policier. Décorateur, il collabore avec FRANQUIN, qui lui rendra la pareille plus tard en scénarisant avec Yvan DELPORTE sa série "Isabelle" de 1972 à 1986, DELPORTE prenant en charge le reste de la série. Il s'occupera également de "Jacky et Célestin", de "Benoît Brisefer" avec PEYO, de Record et Véronique avec René Goscinny, de Marco et Aldebert avec Rosy et Vicq, de "Eric et Artimon" avec VICQ et de "Natacha" avec WALTHERY. À la mort de Tillieux en 1978, c'est un jeune scénariste de nationalité américaine, Stephen DESBERG, qui reprend le flambeau de Tif et Tondu. Fin des années 80, WILL étonne en changeant radicalement de registre. Sur des textes de DESBERG, il s'oriente vers des récits plus occultes et la couleur directe avec "Le Jardin des Désirs" un ouvrage délicieusement coquin, "la 27e Lettre" et "L'appel de l'Enfer". WILL est l'un des plus grands talents de l'école belge. Ne cessant de toucher à tout en innovant au risque de déplaire. C'est lui qui nous a donné l'énigmatique "Monsieur Choc" et "Kiki" , l'un des premiers personnages féminins qui revendique sa qualité de femme. Ses planches en couleur directe sont de toute beauté. Ses dons sont très variés, il sculpte aussi et sa créativité s'exprime sur tous les supports, il suffit de voir son intérieur pour s'en rendre compte. Il s'adonne également avec bonheur à la peinture et travaille tant le crayon, le lavis, l'acrylique et sans oublier l'aquarelle que la gouache. Exposition au Centre belge de la Bande dessinée en 1996. Pour fêter ses cinquante ans de carrière, la librairie Chic-Bull a organisé une exposition-vente du 2 au 30 septembre 1996. Il fut aussi le parrain du 1er Festival Bd de Mons en septembre 1996. Hommage amical à un grand artiste, l'exposition qui s'est tenue du 5 septembre au 29 novembre 1997 à l'espace BD. Son mur Isabelle du parcours BD de Bruxelles (rue de la Verdure) a été inauguré le 14 novembre 1997. Le Restaurant "Le Bollewinkel" a organisé une exposition de ses peintures fin 1997. Will a été consacré président d'honneur de la 4 ème rencontre BD Le Roeulx qui s'est déroulée les samedi 14 et dimanche 15 mars 1998. Cette manifestation a également mis sur pied une exposition intitulée "Le petit musée de Will" et organisé un concours de dessin "Le vrai visage de Choc". Ce fut sa dernière séance de dédicaces. Il a terminé les décors de la série de dessins animés Isabelle qui ne verra jamais le jour. Une exposition de ses peintures intitulée "L'autre côté de Will" s'est tenue au Centre culturel de Ganshoren en novembre 1998. Une grande exposition-vente intitulée "L'Univers de Will" a eu lieu du 17 avril au 14 mai 1999 chez Raspoutine à Lausanne. L'exposition qui lui a consacré le Festival Quai des Bulles à Saint-Malo a fait l'événement. Papa de nombreux héros BD et qu'ainsi que d'Eric Maltaite, il est un des piliers de la bande dessinée européenne. Son rire et sa gentillesse sont renommés. Sa modestie n'a d'égale que son talent ! Élève de Jijé, ami de Franquin et Morris, Will fait partie de la Bande des quatre. Il est parti rejoindre ses amis Joseph Gillain, André Franquin, Peyo, ce vendredi 18 février 2000. Il nous manque!

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