RÉSUMÉ

Trois nouvelles illustrées de dessins et de photographies mettant en scène des femmes mythiques et sensuelles dans les paysages surnaturels de la mystérieuse forêt d’Ardenne, riche en légendes et en superstitions. En fin d’ouvrage, figurent des explications de l’auteur sur son œuvre ainsi que des extraits d’un entretien avec le dessinateur J.-C. Servais.

À PROPOS DES AUTEURS
Jean-Luc Duvivier de Fortemps

Auteur de Sylvaines

Jean-Luc Duvivier de Fortemps occupe une place tout à fait à part dans notre littérature par les thèmes qu'il aborde (vie des animaux sauvages, légendes liées à des sites précis...), mais surtout par le regard qu'il porte sur l'Ardenne et l'intimité des liens qui l'unissent à la forêt. «Écrivain de la forêt d'Ardenne», c'est d'ailleurs ainsi que lui-même se plaît à se définir, avec toute la charge affective qu'implique le choix d'une telle expression.A contre-courant des modes de notre société matérialiste, affairiste et technocrate, il affirme sa mission d'écrivain : Mon métier à moi, c'est de rêver pour les autres.Jean-Luc Duvivier de Fortemps est né à Bruxelles le 15 juin 1953. Il fréquente successivement l'école Decroly et le lycée Molière. De cette enfance citadine, heureuse et choyée, rien n'émerge à proprement parler, si ce n'est une aversion certaine pour la ville : Je ne situerai jamais un seul de mes récits dans la métropole !Aversion aussi pour toute contrainte imposée de l'extérieur : impossibilité de s'astreindre à une action qui ne soit pas passionnément choisie, impossibilité de se concentrer sur tout autre objet que celui de sa passion.De cette enfance et de cette adolescence émerge un intérêt pour le cinéma (les «Classiques» comme La Belle et la Bête de Jean Cocteau - par ailleurs son tout premier récit (Le cerf et le serf) se présentera d'abord sous la forme d'un scénario) et... l'attente fiévreuse des vacances passées au coeur de l'Ardenne : à Lavacherie-sur-Ourthe, à Herbeumont-sur-Semois (Moulin des Nawés), à Lesse-sur-Lesse, en dessous de Redu, et à Our-Opont, près de Paliseul. C'est la forêt d'Ardenne qui, en effet, le hante, le requiert, l'aspire vers ses origines, le sertit dans ses propres racines : là seulement il se sent lui-même, pour part arbre, pour part animal indompté, pour part chevalier, pour part contemplation... Homme de terrain, Jean-Luc Duvivier de Fortemps est fasciné par les lieux. Il ne serait pas exagéré de dire qu'ils sont le dénominateur commun à toute son oeuvre passée et à venir. Hiver comme été, Jean-Luc Duvivier arpente les vieux chemins et sentes forestières, un calepin à portée, en quête d'un site ou «sas» (paysage remarquable chargé de valeurs symboliques et de forces rattachées au passé légendaire). Il repère et croque en trois traits de crayon une «pierre tournante», les vestiges d'un rempart, une potale... Ce que j'aime, note-t-il, c'est me promener autour et alentour d'un site, visiter ce lieu dans le détail, contempler ses plus belles perspectives, m'asseoir et méditer, écouter, me laisser imprégner par ce lieu (...) me sentir en parfaite symbiose avec le biotope choisi. Ces lieux sont toujours d'une rare sauvagerie, d'une grande beauté et très retirés. En cela ils sont exemplaires.Cependant, l'apogée de l'an, pour Jean-Luc Duvivier de Fortemps, c'est l'automne et la saison du brame (prémices dès le vingt août, clôture aux environs de la mi-octobre). Durant cette période, toutes affaires cessantes, l'écrivain se consacre corps et âme à la forêt. Son carnet foisonne d'annotations détaillées concernant les déplacements du cerf, ses attitudes, son langage décrypté avec une science étonnante. Annotations aussi relatives à l'atmosphère (levers de lune, rafales... sont soigneusement répertoriés par fiches - contrainte choisie !) afin de constituer l'abondant matériau des ouvrages qui seront composés en hiver, dans la tiédeur de la demeure ardennaise aux murs épais, sur fond d'une symphonie de Sibelius...Jean-Luc Duvivier raconte le cerf magique, il se raconte lui-même et, à mesure, son regard nous entraîne là-bas vers la forêt, le domaine qui participe de son être profond, suscitant notre imaginaire, nous conviant là où enfin peuvent se rejoindre formes humaines, végétales et animales, telles qu'en leur primitive harmonie.
Jean-Claude Servais

Illustrateur de Sylvaines

J'aimais chez Jean-Claude Servais le goût de terrain vague, de nature, l'église d'Avioth qui sort de la brume, la musique du dessin et de l'air propre autour de tout ça, de l'air propre. C'est un peu mon pays profond qui dérivait avec des arbres, beaucoup d'arbres, un grand virage vers autre chose, un frisson, un regard tourné vers l'arrière-pays de l'âme; un chien qui aboie dans une étendue désertique et l'on entend, dans les loins, à la tombée du soir - les marais - son pays d'extrême-Gaume. J'aimais sa tendresse à dessiner la femme. Chaque porte qui s'ouvre et chaque porte qui se ferme semble dire : il était une fois. (Julos Beaucarne) Même si ses derniers albums sont en couleurs, l'auteur garde une nette prédilection pour le travail en noir et blanc. Il s'y sent plus à l'aise. Force est de constater d'ailleurs que la conversion à la couleur ne s'est pas toujours avérée heureuse. D'ailleurs, on peut affirmer sans crainte de se tromper que la finesse de son trait de plume y perd. Comment en serait-il autrement puisque les détails foisonnent et que souvent l'histoire rampe dans des sous-bois, là où la lumière est plus sombre... Une des innovations les plus intéressantes dans le travail de Jean-Claude Servais, c'est son utilisation de la planche. Bien sûr, d'une manière générale, il ne rechigne pas à un découpage traditionnel (loin cependant du «gaufrier» classique qui a fait les beaux jours de Spirou et Tintin), mais il affectionne aussi une utilisation de l'espace à illustrer beaucoup moins rigide. Souvent, certaines cases font l'objet d'intéressantes découpes qui invitent le lecteur à recomposer son propre dessin ou même qui semblent donner une troisième dimension à l'oeuvre... un peu comme si le dessin voulait s'ouvrir au monde... (Paul Mathieu) Jean-Claude Servais est né à Liège le 22 septembre 1956 d'un père d'origine gaumaise. Cette extraction va beaucoup marquer le jeune garçon qui passe ses vacances chez sa grand-mère, à Jamoigne: un refuge. A portée de ricochets, un autre espace de liberté et de découverte : la Semois. C'est du reste à Jamoigne qu'il va s'installer avec sa femme et ses trois enfants. De fait, la Gaume et son statut particulier dans l'espace socio-géographique belge vont se retrouver directement dans l'expression graphique de Jean-Claude Servais. Tout ensorcelé par ce pays des origines, c'est cependant à Liège que Jean-Claude Servais va donner une forme concrète à sa passion pour le dessin (partagée un temps avec un intérêt pour la compétition cycliste) en fréquentant la section des arts graphiques de l'Institut Saint-Luc. Très vite, fasciné notamment par Jijé, c'est vers la bande dessinée qu'il se dirige, aidé en cela par la rencontre, durant son service militaire, de Gérard Dewamme avec qui il va créer l'histoire de Tendre Violette. Il va ensuite s'installer à Jamoigne. Dès, 1978, après un très bref passage chez Spirou (quelques histoires signées Jicé), Jean-Claude débute au Journal de Tintin avec un premier récit complet : Le chevalier de Mons. A partir d'avril 1979, il collabore au mensuel (A suivre), mais, parallèlement, il n'abandonne pas le Journal de Tintin, puisqu'il y publie les contes de magie et de sorcellerie (repris dans La Tchalette), puis, en 1983, Isabelle. Dès ces premiers titres, l'essentiel des thèmes a été abordé : la vie paysanne, le fantastique populaire, les personnages folkloriques régionaux, la nature, la forêt et, bien sûr, la femme "incarnée" à merveille par la sauvageonne Violette. Ces premiers récits valent à Jean-Claude Servais un succès immédiat, couronné dès 1982 par le Prix de la bande dessinée pour jeunes décerné à Nice et par le Prix Saint-Michel donné à Bruxelles la même année. Dans la foulée, Violette quitte même les planches de BD pour monter sur les planches de théâtre grâce à une mise en scène de Jacques Herbet. Popularité oblige, Jean-Claude Servais est vite réclamé par tous les festivals de bande dessinée : Angoulême, Bruxelles, Durbuy, Sierre, Grenoble, Québec, Lobédé (Longwy)... Souvent aussi, il récolte les faveurs du public : en 1992, par exemple, il se voit couronné par le Prix du Public du Festival BD Durbuy Strip. En octobre 1985, alors qu'il vient de quitter le Journal de Tintin, le Centre d'Art Contemporain du Luxembourg Belge met le dessinateur à l'honneur en créant, au Centre culturel d'Izel, l'exposition Croque la vie. L'année suivante (de décembre 1986 à février 1987), c'est le Centre Wallonie-Bruxelles qui présente une seconde exposition : Parfums de Violette. Une expérience du même type sera d'ailleurs reconduite à Jamoigne en 1999 avec la série La lettre froissée.

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