Avec le groupe Mu. — Le groupe Mu repense ici la rhétorique selon les concepts de la modernité, pour lui redonner la place qu’elle mérite dans notre culture. S’appuyant sur les acquis de Saussure, Hjelmslev, Benveniste ou Jakobson en linguistique, aussi bien que sur ceux des nouveaux théoriciens de la littérature, les auteurs décrivent les éléments fondamentaux dont toute figure de langage est composée: ils relient ainsi la rhétorique à la linguistique, la sémiotique et la poétique,…
Leçons de possession : Les archives de la drogue d’Henri Michaux
L’activité éditoriale consacrée par Henri Michaux au domaine de la drogue couvre dix ans, de 1956 à 1966, au cours desquels parurent Misérable miracle , L’infini turbulent, Paix dans les brisements, Connaissance par les gouffres et Les grandes épreuves de l’esprit. Mais il y a également quelques souvenirs datant de 1983, Par surprise et Le jardin exalté. Autant de titres explicitement signifiants que précèdent au loin une allusion dans Ecuador en 1929 et quelques pages discrètement nommées Ether dans La nuit remue en 1931. À la diversité des alcaloïdes dont l’usage est mentionné, la mescaline issue d’un cactus mexicain, le LSD tiré de l’ergot de seigle et la psilocybine produite par un champignon mexicain, s’ajoute dans ces ouvrages une variété de discours sur l’expérience de la drogue. Ils vont des descriptions cliniques aux évocations poétiques, et dans les marges qui apparaissent parfois, sont mentionnés les lieux, les circonstances, les doses, les substances, les sensations.Raymond Bellour, dans les Œuvres complètes qu’il a éditées, montre que les paroles marginales et les dessins donnent à la lecture une dimension nouvelle, que les addenda font apparaitre la distance prise par Michaux à l’égard de ses expériences, que les archives, les correspondances, les épreuves corrigées et les réécritures sont les signes de l’insupportable trouble qu’il a ressenti et de la maitrise qu’il a été capable de conserver. Muriel Pic franchit un pas supplémentaire. Pour Leçons de possession , elle entre dans l’atelier de Michaux et, replaçant l’œuvre mescalienne dans son contexte, explique que les textes et les dessins nés de la folie volontaire ont d’abord été considérés par le milieu médical comme des documents scientifiques sur l’hallucination. On trouve, en effet, dans les premières notes d’auto observation parues dans des revues de la pharmaceutique qui mobilisent artistes, écrivains et patrimoine culturel, les noms de Ciba, Geigy ou Sandoz… Mais l’approche scientifique se mue en ce que Muriel Pic considère comme une posture lyrique : de l’aliénation expérimentale nait un déplacement de la figure de l’auteur, une présence étrangère en soi et un état de possession. En allant plus loin que Walter Benjamin, Aldous Huxley ou Ernst Jünger dans sa « recherche de l’émotion souveraine » l’auteur de Connaissance par les gouffres est passé des descriptions cliniques aux évocations poétiques. Jacques Carion Plus d’information Muriel Pic propose un texte inédit sur les expérimentations de drogues par Henri Michaux à l’époque où l’on inventait les médicaments psychotropes. Henri Michaux (1899-1984), écrivain et peintre parmi les plus connus de sa génération, participe à partir de 1955 aux recherches sur les hallucinogènes conduites à l’échelle mondiale. Pendant des années, il va expérimenter diverses substances – haschich, mescaline, champignons, LSD – sous le contrôle et en collaboration avec l’hôpital Sainte-Anne, le Muséum d’histoire naturelle de Paris ou encore avec les laboratoires pharmaceutiques suisses Sandoz, qui produisent les molécules utilisées à des fins cliniques et thérapeutiques. La révolution psychopharmacologique aboutit à l’invention de la médication psychotrope et au contrôle chimique du comportement. Cet événement majeur dans l’histoire des sciences est raconté ici du point de vue d’un artiste qui en fut à la fois le témoin et l’acteur. Muriel Pic se fonde sur les archives inédites des expérimentations sous drogue de Michaux : des notes d’auto-observation d’un incomparable éclat poétique. À partir de ce matériau fascinant, l’ouvrage replace pour la première fois l’œuvre de Michaux dans son contexte en rappelant que ses textes et dessins nés de la folie volontaire ont d’abord été considérés par les médecins comme des documents scientifiques sur l’hallucination. Cet ouvrage est richement illustré des dessins de Michaux créés sous influence et de nombreux documents issus de ses « archives de la drogue ».…
L’artisanat du roman : Initiation à l’écriture créative
Destiné à ceux et celles qui écrivent ou que l’écriture de fiction tenterait, cet essai est nourri de la demande faite un jour à Thomas Lavachery d’animer un séminaire autour des « Pratique de l’écriture pour la jeunesse » dans le cadre d’un master consacré aux métiers du livre jeunesse créé par l’Université Charles de Gaulle, Lille 3 . Auteur jeunesse prolixe et reconnu, notamment pour sa saga Bjorn le Morphir parue à L’école des loisirs où l’essentiel de son œuvre est publié, Thomas Lavachery s’appuie sur son expérience, et il n’hésite pas à l’écrire, sur certaines de ses erreurs pour prodiguer ses conseils aux candidatꞏeꞏs écrivainꞏeꞏs, et on sait qu’ils et elles sont nombreuxꞏes tant la littérature fait (encore) rêver certainꞏeꞏs.S’il s’est appuyé sur son propre travail pour écrire cet essai de creative writing comme on dit du côté anglo-saxon où les formations sont nettement plus répandues qu’en littérature francophone, Thomas Lavachery cite aussi de multiples confrères et consœurs, parfois en comparant leurs pratiques. Citons Tolkien, J.K. Rowling, Simenon, Marguerite Yourcenar, Paul Auster, George Orwell, Elena Ferrante, Stendhal, Proust, Flaubert, Dostoïevski, mais surtout Jules Verne et Alexandre Dumas, le plus cité dans le livre. Notons que Thomas Lavachery rend une autre forme d’hommage à ces aînéꞏeꞏs en les portraiturant lui-même dans cet essai. Il ne manque pas de faire référence à Stephen King pour son livre Écriture, mémoires d’un métier , ou Robert-Louis Stevenson pour ses Essais sur l’art de la fiction , mais également La dramaturgie, les mécanismes du récit , d’Yves Lavandier et Le roman d’aventures de Jean-Yves Tadié. Thomas Lavachery propose d’ailleurs en fin de volume la bibliographie du parfait apprenti écrivain.Sur ces bases pratiques et théoriques, il passe en revue divers éléments de l’écriture créative comme le plan de départ, le synopsis, l’intrigue, le schéma narratif, l’ironie dramatique, la crédibilité, les personnages, les descriptions et les dialogues qui sont d’authentiques créations, le temps romanesque avec ses rythmes et ses ellipses, pour n’en citer que quelques-uns. Précisons que chaque chapitre se termine par des exercices pratiques d’écriture pour ceux et celles qui voudraient passer à l’action sur écran ou sur papier. Là aussi les pratiques varient.Si Thomas Lavachery aborde les genres littéraires comme le roman d’aventure et le roman historique auxquels on le sent attaché, tout comme la littérature jeunesse avec un chapitre consacré aux illustrations et aux interactions avec le texte, il passe sous silence d’autres approches scripturaires comme celles du Nouveau Roman.Écrire est une chose, éditer en est une autre. L’ouvrage se termine sur cette autre réalité en évoquant les liens particuliers qui se nouent entre les auteurs et autrices avec leurs éditeurs ou éditrices, lecteurs et lectrices, correcteurs ou correctrices, voire les sensitivity readers , apparus dans le sillage du politiquement correct et du wokisme pour veiller à ne choquer aucune sensibilité au risque d’édulcorer les textes.Si vous souhaitez deux conseils d’écriture pour terminer, nous avons épinglé ceux-ci cités dans L’artisanat du roman : « Il n’y a qu’un seul art : l’art d’omettre ! », de Stevenson et « La bonne prose est comme une vitre transparente », d’Orwell. Il n’y a plus qu’à… Michel Torrekens Plus d’information Les académies existent pour la peinture, la sculpture, la musique… S’agissant du roman, l’inspiration serait seule à l’oeuvre. Tout viendrait des Muses et rien de la technique. C’est du moins l’idée qui a longtemps prévalu dans les milieux littéraires francophones. Une évolution se dessine cependant, et les cours d’écriture créative, ateliers et autres workshops commencent à fleurir en France et en Belgique. Thomas Lavachery, romancier, chargé d’un cours de pratique de l’écriture pour la jeunesse à l’Université de Lille, livre ici ses idées sur l’art de la fiction. Ses réflexions sur les grands ressorts du roman – l’intrigue, les personnages, les descriptions, les dialogues… – sont illustrées de maints exemples et prolongées par des exercices d’écriture. L’Artisanat du roman propose une initiation personnelle et passionnée à ce métier si beau : romancier. « Écrire n’est pas différent des autres activités humaines, assure l’auteur. La maîtrise technique est source…