Ostende, premier volet de la série Derrière, est au premier regard une série de peinture, promenade mélancolique dans les paysages sereins des Flandres. Mais sous leur beauté picturale, hors du temps, ces paysages sont prêts à éclater, habités d’hypothèses quant à ce que cachent les apparences et l’habitude, habités de désirs, fantasmes, formes – chair ou abstractions – dont on ne sait s’ils sont réels ou imaginaires. Une grammaire géométrique perturbe l’espace, des bruits rompent un confortable silence et le font parler, comme des accidents dans le décor d’un spectacle bien rôdé, des déchirures dans une toile bien connue, par lesquels s’engouffrent sensations, tensions, désirs…
Entre autres visions, nous rencontrons Irène, sexagénaire qui aime à se dévêtir en milieu naturel, sous le regard d’hommes en costume cravate qui jamais ne la toucheront. Irène cherche l’extension du domaine des sens et du corps, l’élargissement de la perspective. Elle veut toucher du doigt l’impalpable et s’y fondre, être touchée, submergée, voir ce qui bout sous la surface tranquille des choses. À Ostende, il s’agit de quitter une vie, où l’habitude et des sens corsetés nous tiennent, pour une autre, dans le même lieu et à la même époque. Le temps se dilatte sous la force émanant d’un paysage, ou se contracte lorsqu’un détail, un geste ou un visage témoignent d’une vie entière.
Posant des yeux à la fois voyeurs et bienveillants, Ostende déchire la surface que nos yeux se bornent à voir, saisit ce qui se passe horschamp, où rugissent en silence des désirs, des élans vitaux, où dansent sensations et abstractions. Derrière la digue, dans une ferme isolée, sur une plage la nuit, ses paysages forment une scène où tout peut survenir, calme avant l’orage de sensations. Un contrechamp fourmillant d’aventures cachées s’installe petit à petit, révélé par une prose suggestive, procès verbaux de scènes érotiques ou libératrices.
Dominique Goblet souffle le froid et le chaud, nous fait errer, chercher. Elle nous fait glisser de la douceur à la brutalité, du loufoque au sublime, sur un fil entre un réel trop calme et un imaginaire luxuriant. Notre soif de liberté et notre peur de l’inconnu se confrontent sans cesse, et peu à peu se concilient dans l’envie
Autrice et illustratrice de Ostende
En 2008, Faire semblant c’est mentir (L’Association), qui racontait son enfance et son rapport à ses parents, est nommé à Angoulême. Il reçoit la même année le Prix international de la Ville de Genève. En 2010, elle achève Chronographie (L’Association) qui recueille, depuis 2002, des portraits qu’elle fait de sa fille et que sa fille fait d’elle. Plus si entente (FRMK et Actes Sud BD), co-écrit avec Kai Pfeiffer, et L’amour dominical (FRMK), fruit d’un travail en duo avec Dominique Théate, viennent compléter son œuvre. Dominique Goblet est également plasticienne et expose régulièrement peintures et sculptures en Belgique et à l’étranger. Ses techniques mixtes, ses influences multiples, sont mises au service d’une écriture graphique unique. Preuve que l’autrice et illustratrice belge bénéficie de la reconnaissance de ses pairs au niveau international, Dominique Goblet a été désignée en 2019 présidente du jury du Festival de la Bande Dessinée d’Angoulême. Avant de recevoir le prix Atomium de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Dominique Goblet avait reçu, en novembre 2019, le Grand Prix Töpffer. Ce prix, décerné par le canton et la ville de Genève, récompense, chaque année, un artiste francophone pour l’ensemble de son œuvre.
Lauréate d'une bourse de la Fédération Wallonie-Bruxelles - Aide à la création, 2024
Candide ou l’optimisme, de Voltaire, T.1
Candide vivait en toute insouciance au château de Tunder-Ten-Tronch en Westphalie. Mais pour avoir osé poser les yeux sur Cunégonde, la fille du châtelain, il est expulsé de ce petit paradis. Commence pour lui une errance au cours de laquelle il…
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Vienne, 1907. Le peintre Gustav Klimt rend visite aux époux Bloch-Bauer. Ferdinand demande alors à Gustav de réaliser le portrait de sa femme, Adèle ; requête entraînant un flashback. Six ans auparavant, alors que Klimt essuyait des critiques acerbes au sujet de son œuvre La Médecine , il a rencontré ce couple, admirateur de son génie et dont la femme l’a prié de lui ouvrir les portes de son atelier. Au même moment, l’artiste recevait en rêve l’inspiration pour son prochain tableau. C’est par ce prisme que l’on entre dans l’univers de l’artiste : son atelier, ses modèles, sa mère, sa compagne, Émilie, mais aussi ses rêves, ses angoisses, ses sources d’inspiration en somme. L’histoire narrée en bande dessinée par Cornette et Marc-Renier est une tranche de vie, prétexte à l’évocation du peintre, de son style, de son époque et de l’avant-gardisme dont il y faisait preuve. L’idée est en effet plus de mettre en avant ses particularités que de réaliser sa biographie. Le récit est assez simple et aurait peu d’intérêt sans l’aspect « inspiré de faits réels », mais n’en est pas moins cohérent et bien rythmé.Les dessins sont soigneusement détaillés. Le rendu est classique, avec un crayonné assez fort accentuant les sujets principaux. Les travaux de Klimt évoqués sont réinterprétés plutôt que cités et le résultat est réussi et efficace : le redesign des œuvres permet une intégration fluide dans les cases tout en invitant à les découvrir sous un angle neuf.Le récit principal est suivi d’un court cahier didactique sur Gustav Klimt. Il complète la bande dessinée en développant quelques sujets qu’elle évoque. On y voit notamment des reproductions des œuvres évoquées dans l’album. Ainsi, le lecteur a à portée de main de quoi satisfaire sa curiosité, titillée par l’histoire racontée en images et phylactères.La bande dessinée Klimt est une introduction sympathique à l’œuvre de l’artiste. Les connaisseurs n’apprendront probablement pas grand-chose, là où les néophytes apprécieront l’accessibilité du propos et les informations proposées en fin d’ouvrage. Les visuels soignés plairont aux amateurs de bande dessinée traditionnelle, alors que l’histoire…