Autrice de Les mots donnent faim
Lucienne Dietsch est née le 16 mars 1921 à Saint Gratien, petit village de la banlieu du Nord de Paris, où ses parents étaient cultivateurs. De vieille souche paysanne et artisane, elle est la petite-nièce du forgeron Desnoues qu'Alain Fournier a évoqué dans Le Grand Meaulnes. L'atmosphère rurale, le contact intime et quotidien avec la terre, le rythme des travaux et des jours, marqueront son imaginaire et nourriront ses premiers chants, ainsi que les poèmes appris à l'école, et deux "coups de foudre éblouissants" : la lecture de Rimbaud et Giono. À 17 ans, elle est contrainte d'aller gagner sa vie à Paris comme secrétaire d'un avocat. Elle écrit déjà des poèmes dans lesquels s'expriment sa soif intense de liberté, de fusion avec le monde naturel, et son attachement à ses racines terriennes. Elle est encouragée d'abord par Charles Vildrac, qui préface son premier recueil, Jardin délivré, puis par Colette, Léon-Paul Fargue, Supervielle et Giono, qui saluent en elle un grand poète lyrique. Elle épouse en 1947 Jean Mogin, poète et dramaturge belge, fils du poète Norge, qui deviendra le compagnon bien-aimé de toute sa vie, et dont elle aura deux filles : Isabelle et Sylvie. Elle s'installe à Bruxelles tout en gardant sa nationalité française ; son pseudonyme, Desnoues, nom de jeune fille de sa mère, témoigne de l'amour qu'elle lui a porté et de ses attaches avec le Berry, pays de lignée maternelle, où "noues" signifie "pré marécageux". À partir de 1952, année où parait Les Racines (prix René Vivien), Lucienne Desnoues publie régulièrement des recueils de poèmes fidèles à son aspiration initiale: La fraîche (1958, prix Gérard de Nerval), Les Ors (1966), la Plume d'oie (1971), Le Compotier (1982), Quatrains pour crier avec les hiboux (1984). Et aussi des textes en porse : L'Oeuf de terre (1978, Prix de la littérature gastronomique), L'Orgue sauvage et autres contes de Noël (1980).En 1951, elle découvre avec émerveillement la Haute-Provence, grâce au poète Lucien Jacques, le meilleur ami de Giono, qui lui offre une vieille maison à Montjustin, où elle passe désormais toutes ses vacances familiales. En 1956, après le décès de Jean Mogin, elle s'y installe définitivement et continue à écrire, insoucieuse de toutes les modes, de tous les conformismes : Dans l'éclair d'une truite (1991), Fantaisies autour du trèfle (1992), L'Herbier naïf (1994), Un obscur Paradis (1998). La même année elle compose son Anthologie personnelle, mêlant des poèmes anciens et inédits. Le 4 août 2004, elle décède à Montjustin. Elle y repose aux côtés de son époux. Toute sa vie, elle aura tenté par la poésie de "prolonger le furtif par l'écrit", de célébrer l'éternel et le sacré dans le plus humble quotidien, en puisant aux sources vives du langage et du monde.
Prix Margueritte van de Wiele 2002. "Elle tourna brusquement les talons pour se jeter dans la volée d’escaliers et fuir le regard de sa fille. Elle se sentait exaspérée, incomprise de tous.…