Les bons offices


RÉSUMÉ

Paul Sanchotte – mi-Sancho, mi-Quichotte – fait métier de se trouver là où l’Histoire est brûlante, afin d’enquêter, d’alerter, de rédiger des rapports, d’empêcher tant bien que mal l’irréparable qui est souvent aussi l’inéluctable : c’est M. « Bons-offices », chargé de cette mission entre toutes impossible – s’immiscer dans les conflits et se vouloir au-dessus de la mêlée.

Le médiateur, sur ce chemin pavé des meilleures intentions et des pires malentendus, se révèle incapable de devenir le « casque bleu » de sa propre vie privée, du couple qu’il forme avec Roxane, de leurs sentiments eux aussi à feu et à sang. Pour eux non plus le temps n’arrange jamais les choses : au moment où l’Histoire et celle de cet « homme de bonne volonté » le rejettent comme un apatride sur une terre d’irréconciliation – le Proche-Orient -, il ne lui reste de l’une et de l’autre qu’un monceau d’éléments détachés, un charnier de souvenirs mutilés qu’il s’applique à identifier et à rassembler, lui dont c’est la spécialité de recoller les morceaux.

Avec la chronique éminemment contemporaine de Bons-Offices, nouveau Job sur la poubelle de notre histoire récente – de la mort des Rosenberg au génocide biafrais, du martyre de Lumumba au réarmement moral selon Mao, de la catastrophe de Marcinelle au déracinement des Palestiniens… – c’est un monde à bout de souffle qui porte témoignage de sa propre décomposition.



À PROPOS DE L'AUTEUR
Pierre Mertens
Auteur de Les bons offices
Pierre MERTENS, Petites et grande Histoire(s) «Le plus sûr moyen d’inventer, c’est encore de partir du réel» (PM) Ses plus de trente ans d’écriture ont fait de Pierre Mertens le personnage-phare de la littérature belge francophone. Marquée par la fameuse notion de ‘belgitude’, que l’écrivain a lui-même forgée en 1976, toute son œuvre offre à ses compatriotes les mots pour se dire, en les arrachant à leur état d’indéfinition maladive et en affirmant la valeur romanesque de leur pays. Puisque pour lui, «écrire, c’est donner une suite au monde», il entend créer un sens dans le chaos et traduire une inquiétude qui pourrait échapper définitivement. On trouve ainsi la ligne de force majeure de sa pensée, la question du sens de l’Histoire. Que celle-ci soit écrite avec une majuscule ou une minuscule, puisque chez lui les histoires personnelles n’existent qu’en s’inscrivant dans la grande Histoire. Prenons quelques exemples. «Les Bons Offices» (1974), cette «fête scintillante et funèbre», pour dire comme Régis Debray, est un roman qui met en scène la vie fort troublée d’un diplomate belge, nommé Sanchotte (mi-Sancho, mi-Quichotte ou peut-être tout simplement don Quichotte moderne), envoyé en mission humanitaire au Proche-Orient. Mais chez les Israéliens, les Palestiniens ou bien encore chez les époux Sanchotte, aucune paix ne semble possible : seul règne le conflit comme si l’Histoire se livrait à un formidable travail de destruction. Toujours aux prises avec la violence originaire dans un monde qui se disloque, «Terre d’asile» (1978) médite sur les libertés bafouées à partir de l’épopée d’un réfugié politique chilien, débarquant à Bruxelles sur un campus universitaire, l’été 1977, à la recherche d’une nouvelle vie. C’est par un même climat de transgression que «Perdre» (1984), un texte flamboyant, s’inscrit dans la thématique : à la passion des amants, sur fantasmes de mise à mort, répond ici ou là, la fureur des soulèvements à Beyrouth et à Varsovie. Biographie fictionnelle d’un visionnaire, un temps aveuglé par la barbarie nazie, «Les Eblouissements» (1987) rapporte sept moments de la vie du médecin et poète expressionniste allemand, Gottfried Benn. Ce récit, à la fois critique et compassionnel, d’un «voyage au bout du fourvoiement» permet d’approcher dans leurs ombres et leur complexité près de trois quarts de siècle, de 1886 à 1956. «Une paix royale» (1995) participe, à sa manière, d’un même esprit, et s’offre comme un exemple privilégié de la subtile intrication mertensienne des deux histoires. L’analyse fine et originale d’un moment particulièrement sensible du devenir de la Belgique – la question royale – passe par le point de vue d’un narrateur ambivalent, plein d’audace, hanté par le personnage de Léopold III et le souvenir meurtri d’un passé de guerre. Soulignons l’importance de ce dernier thème, déjà présent dans «La Trilogie de l’enfance» – composée d’un recueil de nouvelles, «Le niveau de la mer» (1970) et de deux romans, «L’Inde ou l’Amérique» (1969), «La fête des anciens» (1971) – et qui trouve dans «Perasma» (2001) une ultime et étincelante actualisation. Ce qui suscite et nourrit la passion des amants, c’est, en effet, ici, une connivence de «préhistoires», un langage commun, une espèce de «babil secret» qui remonte à l’âge le plus tendre. Le tout sur arrière-fond de tensions internationales (la Grèce des colonels, l’Holocauste, l’Europe de l’Est), bien entendu ! Ainsi, pour Pierre Mertens, l’inscription particulière d’une histoire dans l’Histoire s’opère à partir de nombreux vecteurs comme la politique, l’enfance, la médecine et la musique, qui renvoient assurément aux particularisme de sa biographie (une enfance passée en temps de guerre, l’engagement de ses parents dans la résistance, une judéité qui ne lui sera révélée qu’à l’âge adulte, une appartenance à une patrie vouée à sa perte). C’est ce qui constitue le noyau ou le moyeu à partir duquel il déploie son écriture, et ce qu’il vérifie aussi, peut-être, lorsqu’il étudie dans des essais comme «L’agent double» ((1989) et «Une seconde patrie» (1997), les œuvres de certains écrivains particulièrement emblématiques, tels Cortàzar, Duras, Sciascia, Kafka, Malraux ou Pasolini.  

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