Le livre au temps du confinement

RÉSUMÉ

En prenant pour objet le livre au temps du confinement, cet essai tente d’appréhender le fonctionnement de l’industrie du livre à l’arrêt. Contrairement à ce qu’on pourrait penser en effet, la chaine du livre n’est pas tombée en léthargie. La chaine du livre s’est adaptée au confinement. Ses terrains d’élection ont été le théâtre d’une activité intense : auteurs, éditeurs, imprimeurs, distributeurs, libraires, bibliothécaires et lecteurs ont été à l’origine de stratégies de survies, constructives ou désespérées, et d’un grand nombre de discours sur le livre et les métiers du livre.

À PROPOS DE L'AUTEUR
Tanguy Habrand

Auteur de Le livre au temps du confinement

Tanguy Habrand est licencié en Langues et Littératures romanes, et titulaire d’un DEA interdisciplinaire en Philosophie et Lettres (orientation Sciences du Livre). Assistant et maître de conférences au sein du Département Médias, Culture et Communication (ULiège), il est membre du Centre d’Étude du Livre Contemporain (CELIC). Il travaille également aux éditions Les Impressions Nouvelles en tant que responsable de la collection « Espace Nord » (propriété de la Fédération Wallonie-Bruxelles, riche de près de 400 titres du Patrimoine littéraire francophone belge), et de la collection « La Fabrique des Héros », en codirection avec Dick Tomasovic. Il a publié, en 2007, un ouvrage portant sur l’absence d’un prix fixe du livre en Belgique, complété en 2010 par un rapport sur l’harmonisation du prix du livre importé de France en Belgique pour le compte de la Direction générale de la Culture. Il a publié en 2020 un essai sur Le Livre au temps du confinement. Il mène une thèse consacrée à la théorie de l’indépendance éditoriale qui sera déposée au cours de l’année académique 2020-2021. Tanguy Habrand se consacre à la socio-économie des circuits du livre dans le prolongement des travaux initiés à l’Université de Liège en la matière (Yves Winkin, Pascal Durand), des théories de l’institution (René Lourau, Jacques Dubois), de la sociologie des champs (Pierre Bourdieu) et de l’analyse des stratégies éditoriales (Jean-Yves Mollier, Bertrand Legendre). L’une des particularités de sa ligne de recherche est d’associer étroitement pratique et théorie : travaillant à mi-temps dans l’édition, il fréquente assidûment le terrain et veille, en outre, à exercer un travail d’expertise dans le monde du livre.
NOS EXPERTS EN PARLENT...
Le Carnet et les Instants

Loin des indigestes journaux de confinement qui ont accompagné la Covid-19 comme son ombre, loin de l’avalanche d’essais plus ou moins éclairés, se contentant le plus souvent de surfer sur la vague de l’opportunisme, dans Le livre au temps du confinement, Tanguy Habrand analyse avec brio les impacts de la crise covidienne sur la chaîne du livre. Davantage que s’en tenir à une radiographie des manières dont l’industrie du livre a fait face, s’est adaptée (ou pas) au confinement, Tanguy Habrand appréhende la crise sanitaire comme un révélateur, un « analyseur » écrit-il, des champs du monde culturel, plus largement du monde socio-politique. La pandémie posée en « analyseur institutionnel » a permis de mettre à nu le…


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Le sac à dos qu’on porte en voyage, ou celui que nous portons depuis notre enfance, devient de plus en plus lourd avec les jours qui passent, les blessures, les combats, les amours déchirées et les désillusions. À moins qu’au contraire, il ne devienne de plus en plus léger avec la sagesse qui grandit et nous fait mûrir ? La réponse est dans le voyage : la sagesse n’est pas dans le sac, mais au fond de nos yeux qui le regardent. Par la fenêtre du Transsibérien, sur les chemins escarpés des montagnes andines, dans le dernier McDonald’s planté sur le cercle polaire, au milieu du bush australien ou dans les bras d’une femme en Wallonie, il y a une vie à prendre, un œur à dessiner. Le métier de comédien des rues a entraîné durant quinze ans Timotéo Sergoï autour du monde. En voici une photo, un croquis, quelques phrases. Puissiez-vous y retrouver le visage de quelqu’un que vous connaissez ou que vous avez perdu là. Pendant dix ans j’ai voyagé, traversé quarante pays, écrit des centaines de feuillets. Des textes courts retraçant au jour le jour mon parcours. C’était au début des années 2000. Je tenais un « blog ». Cela ne s’appelait pas encore comme ça. En route, rien n’était alors techno-simple comme aujourd’hui. C’était un carnet de voyage, un journal de bord en lignes par milliers. Je me suis parfois demandé que faire de tous ces textes intimes et exotiques. Faudrait-il les retravailler pour publier ? Sur la passerelle, un clochard sans prénom me parle de ma barbe. Timotéo Sergoï m’apporte enfin la réponse, dix années ont encore passé, nos mentons en fouillis et c’est non ; sans doute ni regret. Un non de soulagement. J’ai trouvé mon maître. En matière d’impressions de voyage, de géopoésie, de sentiments lointains embagagés, d’aventures à pied, de pensées kilométriques, il est tellement plus fin et fluide car moins littéraire. Je reconnais entre ses lignes l’accueil de la T/terre, sa profonde, phénoménale, infinie bonté ; son inconditionnelle, indifférente générosité, ingéniosité. C’est le quartier-tapin. Putain de beau métier ! Me voici dans la Suisse sale, vivante et éruptive, rue de Berne, rue des Pâquis, rue des bordels et des métèques, quartier de nuit et d’impatience, dernier quartier avant l’aurore (…) Lire aussi : un extrait de  Traverser le monde avec un sac de plumes Le sous-titre du livre, Voyager comme pour jouer , dit le degré d’aisance et d’ingénuïté avec lesquels l’auteur et polyartiste se déplace partout au monde. Et l’amour y est toujours, comme du soleil qu’il suivrait toute l’année, de pays en pays, d’un solstice à l’autre, sautant l’équateur à l’envi, s’assurant ainsi un éternel été. Et couché sur le dos de la planète, Timotéo Sergoï respire pleinement les étoiles, ferme les yeux ; où fusionnent l’étincelle de l’entière galaxie et celle de la vie via Argentine… Australie… Brésil… Finlande… Laponie… La Réunion… Russie… C’est carnaval de l’aube. J’aurai marché quatre heures. Je m’en vais déjeuner. Récemment, l’hebdomadaire Le Vif reprenait ces propos élogieux de Pascal Durand lors d’une interview consacrée à l’histoire de l’édition en Belgique : «  Certaines maisons actuelles créent des catalogues remarquables. Je pense par exemple à une petite maison sur les hauteurs d’Esneux, Murmure des soirs  ». Qui publie le présent ouvrage. Remarquable en effet. Plus que cela. Page 51, Liège (Belgique), jour de retour , est un court et brillant dialogue où court l’errance heureuse, libre et interrogative de tout voyageur au long cours : Que sais-tu des départs ? (…) des voyages ? (…) des retours ? Que sais-tu de l’attente ?Je la connais trop bien. Et je sais de sa voix que le souffle des jours fait son érosion lente. Tito Dupret…