La narratrice, une photographe d’origine espagnole, revient sur son parcours parsemé d’embûches, ses relations, ses rencontres, sa carrière, ses années à Paris, à Durbuy, sa résidence d’artiste sur une île finlandaise… Elle nous prévient d’entrée de jeu : nous aurons besoin de tous les éléments pour bien comprendre son histoire. Le récit, qui n’est pas linéaire, vagabonde entre ses pensées. De digression en digression, nous apprenons qu’elle est en prison. Depuis sa cellule, elle entraîne le lecteur dans son récit afin de savoir ce qui l’a amenée là.À vingt ans, elle s’installe à Paris. Jeune artiste sans le sou, un peu barrée et légèrement mélancolique, elle trouve comme logement un atelier, « un…
De Paris à Helsinki et ses îles avoisinantes en pérégrinant par Durbuy, le mystérieux monologue en mouvement de la narratrice-photographe Julia Montoro se déroule depuis un point-fixe : celui de sa cellule de prison. Il l’amène à se dégager de ces territoires existants pour redessiner le sien. Avec Je ne chasse pas sur mon territoire, Astrid Chaffringeon signe un second roman éprouvant.
De Paris à Helsinki et ses îles avoisinantes en pérégrinant par Durbuy, le mystérieux monologue en mouvement de la narratrice-photographe Julia Montoro se déroule depuis un point-fixe : celui de sa cellule de prison. Il…
Le souffle du temps, Histoire peu ordinaire d’une famille belge aux origines allemandes, 1830-2000
Le récit s’ouvre sur un paysage d’été en Angleterre. Albert Brauner marche d’un bon pas vers Manchester. Il va y retrouver Germaine, sa femme, dont il a été séparé pendant les quatre années de la Grande Guerre. Au terme de ce court prologue, Albert s’effondre, frappé en plein front d’une balle. « À une centaine de mètres, un homme agenouillé dans les hautes herbes se lève, range son fusil dans son étui et s’en va sans jeter un regard vers l’homme abattu ».Le récit s’achèvera sans qu’ait été résolue l’énigme de cette exécution d’un homme qui sera enterré avec les honneurs réservés aux combattants de l’armée anglaise. Stéphanie ter Meeren, issue par sa lignée paternelle des Brauner, a voulu explorer cette généalogie hors du commun issue du « patriarche », Thomas Brauner. Né Français, en 1814 – la Belgique n’existait pas -, il deviendra en 1844 l’un des organisateurs de l’enseignement primaire dans le pays qui est créé en 1830. La Belgique, en 1843 venait de voter la loi organique organisant l’enseignement primaire et devait se doter d’un réseau d’écoles normales en Flandre et en Wallonie.Pour mener à bien son exploration familiale, Stéphanie ter Meeren imagine le personnage d’une étudiante qui organise à sa demande les archives d’un vieil homme, Étienne Brauner, le fils du soldat assassiné sur le chemin de Manchester, le petit-fils du patriarche Thomas Brauner.À travers lettres, archives manuscrites, carnets et documents officiels, la narratrice reconstitue les destins singuliers de personnages inscrits dans l’Histoire, la grande. Ainsi le lecteur participe-t-il à l’exode qui jeta sur les routes belges et françaises des milliers de civils effrayés. Les Brauner se réfugient dans leur domaine de Vossebeek , un château acquis par Auguste, la grand-père d’Etienne, où les rois Léopold II et Albert Ier aimaient à participer à des parties de chasse. Des amis y séjournent souvent, comme les époux Derbeid dont Gustave s’est rendu célèbre par ses travaux sur la tuberculose et qui, comme de nombreux médecins, a rejoint le front. On lit l’émotion qui étreint au quotidien les mères et les femmes des jeunes gens qui se sont portés volontaires. On vit ce que représente l’occupation par l’armée allemande de la plus grande partie du territoire belge. Les détails sont éloquents à cet égard : comment se déplacer vers Bruxelles, quelles informations reçoit-on et comment, que racontent les soldats en permission lorsqu’ils reviennent au château transformé en hôpital : l’incendie de Louvain, les apprentissages sommaires de pilotage d’avions, les blessés, les mutilés…Petit à petit, le dialogue se noue entre l’étudiante et le vieillard tandis que le lecteur se nourrit d’anecdotes tombées dans l’oubli, dont les plus intéressantes sont celles liées au patriarche. Ainsi ces expositions scolaires que le public londonien couvrait de louanges au Crystal Palace ou la création de la revue L’Abeille , la première revue de pédagogie en Belgique…Le récit de Stéphanie ter Meeren, couvrant un siècle et demi d’Histoire, ne peut être ici synthétisé. Il se disperse parfois mais ne cesse jamais de piquer la curiosité et l’étonnement du lecteur. Ce dernier ne saura pas les vraies raisons de l’exécution d’Albert Brauner, assassiné d’une balle dans la tête alors que la guerre à laquelle il avait participé en héros, s’achevait enfin. Peut-être y a-t-il dans ce personnage-là la matière à un vrai roman ? Un roman d’espionnage qui déploierait…
C’est un clan d’humains. Ils chassent et cueillent, ils naissent et meurent, ils habitent des…