Faire vivre l’opéra, un art qui donne sens au monde, Entretiens






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Le Carnet et les Instants

À l’occasion de la septantième édition du festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence, un festival que Bernard Foccroulle dirige depuis douze ans, paraît un recueil d’entretiens au fil desquels celui qui fut auparavant le directeur du Théâtre royal de la Monnaie (1992-2007), livre son regard sur l’opéra, ses devenirs, son avenir, ses enjeux actuels. Pour couronner sa dernière saison à la tête du festival d’Aix, il dresse un bilan, une cartographie de la vitalité de l’opéra contemporain, interroge sa place dans la cité, son actualité, sa capacité à penser les mutations du monde. Si, loin d’être devenu une institution muséale, tournée vers le passé, l’opéra affiche de nos jours une créativité audacieuse et une connexion à un monde qu’il questionne, c’est,…


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Dépasser la mort : L’agir de la littérature

« Je suis juste quelqu’un qui, comme nous tous, a vu s’effondrer la falaise juste à côté de soi, qui a tremblé au bord du gouffre, et qui a échappé au vertige parce qu’un, puis deux, puis un grand nombre d’écrivains lui ont pris la main pour le tirer en arrière. Venez, je vous précède et je les suis. » En ouverture de son dernier livre, Myriam Watthee-Delmotte nous fait la confidence du suicide d’un ami, André, dont la mort à quarante ans a provoqué le séisme intime dans lequel nous plonge la disparition des êtres chers. Ce bouleversement laisse sans voix et sans mots ceux qui, au contraire de Myriam Watthee-Delmotte, n’ont pas exploré les voies de résilience que la littérature nous ouvre et dont l’auteure de Dépasser la mort nous propose ici quelques titres choisis dans sa bibliothèque. Celle qui a créé le Centre de Recherche sur l’Imaginaire à l’Université catholique de Louvain a élargi le champ du littéraire à celui de la musique : son livre nous propose un accompagnement musical sélectionné dans le catalogue du label Cypres, et disponible en écoute libre sur le site de l’éditeur musical. Pour nous guider, et aller au-delà de son expérience personnelle, Myriam Watthee-Delmotte envisage le face à face avec les multiples visages de la mort, dont les plus grimaçants sont à n’en pas douter le suicide et la mort d’un enfant, en nous proposant de jeter au dessus de l’abîme des passerelles de mots, de phrases, de livres dont elle égrène au fil des chapitres, les secours qu’ils pourraient nous apporter, le premier d’entre eux étant d’   «  accueillir la réalité douloureuse et fondamentale qu’est la mort  ».Les titres de chacun des chapitres, accompagnés de leur environnement musical, sont autant d’illustrations et de déclinaisons de la phrase de Victor Hugo, placée en exergue du livre : «  Les morts sont les invisibles ; ils ne sont pas les absents  ».Combien de fois n’avons-nous pas, lecteurs, fait cette expérience que seule la littérature permet : lisant un livre, qu’il soit de poésie, de fiction romanesque, de théâtre, nous nous sommes soudain sentis moins seuls au monde parce qu’une phrase nous disait simplement ce que nous étions, ce que nous ressentions, ce qui nous isolait, croyions-nous, du monde. Ainsi nous n’étions pas seuls. Un autre, dans ce livre que nous tenons en main, avait écrit exactement et précisément ce sentiment qui nous étreignait jusqu’à l’étouffement.Sur le chemin escarpé et solitaire du deuil, l’expérience littéraire permet de «  réélaborer du sens face à la mort de l’un des siens  » et d’honorer le défunt en le commémorant.«  La littérature ouvre aux mystères du vivant arc-boutés à la mort  » écrit Myriam Watthee-Delmotte en ouverture d’un des chapitres de ce livre-bibliothèque qu’elle nous propose pour Dépasser la mort. Il fallait à la fois la sensibilité d’une véritable écrivaine, – on lui doit, entre autres, un opéra consacré à Verlaine – et l’érudition d’une inépuisable lectrice, pour mettre en évidence, à partir d’une souffrance intime, la consolation que nous offrent les livres face à la «  béance du sens  » dans laquelle nous abandonne la mort de l’autre.Comment ne pas achever cette recension d’un livre de livres, sans citer ces lignes de Béatrice Bonhomme écrites à la mort de son père, le peintre Mario Villani, et dont la fulgurance nous laisse sans voix, mais consolés de nos propres défunts : «  Tu es posé sur l’étrangeté des mondes, dans le cœur dormant de la nuit, et les larmes coulent sur ton cercueil de neige, dans la dentelle de tes mains d’os et de pierre.  »Nous voici donc moins seuls. Enfin. Jean Jauniaux C’est grâce aux mots que l’on cesse d’être seul face à la mort. Mais d’abord, ils manquent : quand la mort s’abat, elle abasourdit, elle frappe de mutité. C’est alors que les écrivains peuvent venir en aide et répondre au besoin de faire sens pour que quelque chose soit sauvé du gouffre. Face à la tombe, la littérature donne aux endeuillés une voix et le sentiment d’une communauté. Elle est ainsi au cœur de ce qui constitue le propre de l’homme, seul être vivant…

Comès. D’Ombre et de Silence

Thierry BELLEFROID , Comès. D’Ombre et de Silence , Casterman, 2020, 145 p., 29 € / ePub : 19.99 € , ISBN : 978-2-203-18379-7Corbeaux, chouettes, chats, homme-cerf, paysages enneigés, personnages marginaux anguleux, rites d’initiation, génie du silence graphique mettant en scène la Bataille des Ardennes, les sombres conflits entre villageois, la mise à mort des êtres différents… Quarante ans après la parution de l’album Silence , le chef-d’œuvre de Comès , à l’occasion de la souveraine exposition Comès au musée BELvue à Bruxelles dont il est le co-commissaire avec Éric Dubois, Thierry Bellefroid consacre un essai magistral à ce créateur hors norme décédé en 2013. Que l’œuvre de Dieter Comès né en 1942 à Sourbrodt dans les cantons de l’Est se doive d’être lue à partir de l’existence de ce maître absolu de la bande dessinée belge, Thierry Bellefroid le déploie avec passion et finesse. Au fil des pages rythmées par les dessins de Comès, l’ouvrage nous immerge dans un univers hanté par le non-dit, les forces invisibles, le surnaturel, la magie des forêts, le climat fantastique. Du Dieu vivant (1974) au Dix de der (2006) , Comès créera onze albums évoluant d’un style virtuose, en phase avec les couleurs psychédéliques des seventies, proche de Philippe Druillet, à la décantation de formes menant de l’archipel de la couleur à l’alchimie du noir et blanc dont Comès est l’un des sorciers incontestés. Après les femmes-fleurs, les hommes-papillons, les voyages galactiques d’un space opera initiatique truffé de références cabalistiques, Comès qui fut aussi musicien de jazz, percussionniste, emprunte un premier tournant esthétique avec L’ombre du corbeau qui évoque, comme il le fera dans son dernier album Dix de der , la guerre 14-18 qui fit rage dans les Ardennes. Sous l’influence d’Hugo Pratt avec qui il nouera une fidèle amitié, son style s’épure. Après Tardi, il raconte les tranchées, la boucherie du front. Dans un climat fantastique, confronté à des incarnations de la mort, un soldat allemand erre dans les limbes. Comès y tente une nouvelle grammaire, s’accommodant une fois de plus de la contrainte de la couleur mais décidant d’innover ailleurs, dans la mise en scène, dans l’architecture de la page, dans la rythmique .Thierry Bellefroid analyse la nature du virage, expose l’importation de la grammaire du cinéma dans la bande dessinée (panoramique, zoom avant, zoom arrière…), la synthèse des arts que produit l’artiste. Comès allie les instruments du cinéma à la narration graphique, mais, par-dessus tout, il explore les vertus du silence, ce silence des planches avec cases muettes qui l’a fasciné chez Hugo Pratt, ce passage à l’Œuvre au noir et au blanc qui renvoie au silence de son enfance marquée par la guerre, au père germanophone enrôlé dans l’armée allemande, à son mutisme lors de son retour du front russe. Coup de maître en 1980 avec Silence , une fable poétique sur fond de paysages ardennais, autour de Silence, un jeune homme à part, muet, déclaré attardé, au regard reptilien, proche des animaux qu’il magnétise, en butte à la méchanceté d’Abel Mauvy qui l’exploite. Amour interdit avec la sorcière, violence des villageois à l’égard de ceux qui sont différents ­­— Silence, les gitans, les nains… —, arcanes révélant les voies de passage entre la vie et la mort… Silence, l’exclu du langage, soulève une œuvre qui explore des formes d’échange non verbales, mystiques, animistes.L’empreinte du mystère, des dissociations de la personnalité, de notre part sauvage muselée par la société, des fantasmes, de l’onirisme domine La belette , le thriller psychologique Eva sur lequel planent les ombres de Hitchcock, de Klaus Nomi, L’arbre-cœur soulevé par des audaces graphiques qui réinventent le style… Comès ne nous parle pas de sorcellerie, d’envoûtements, de magie noire dans des campagnes reculées : magicien, il accomplit graphiquement des rites incantatoires, des sortilèges, s’attachant à des êtres en marge du système, plus proches du monde animal, végétal, minéral que de la société des humains qui les rejette.Magnifique voyage dans l’univers de Comès, Comès. D’Ombre et de Silence convoque aussi les témoignages de personnes qui l’ont connu, Hugues Hausman, François Schuiten, Benoît Peeters, Didier Platteau, Micheline Garsou, Christophe Chabouté… Le livre refermé, on rêve que, sept ans après la mort de Comès, le scénario de La maison où rêvent les arbres se concrétise : «  Un jour, les arbres se révoltent contre l’homme et leurs rêves engendrent des ptérodactyles, des crocodiles, qui agressent l’homme parce qu’il a rejeté la communion qui le liait à la nature, l’homme a rejeté la mémoire du bois. Les livres commencent à rejeter l’encre  ».À l’occasion de l’exposition Comès. D’Ombre et de Silence au musée BELvue (jusqu’au 3 janvier 2021, Fonds Comès de la Fondation Roi Baudouin), Casterman publie Ergün l’errant (réunissant ses deux premiers albums Le dieu vivant et Le maître des ténèbres ), Comès, les romans noir et blanc, 1976-1984,…

Œuvres

Édition établie et présentée par Roland…