Sous la bannière des mots, choisis pour leurs allitérations, leur proximité, les effets combinés des jeux du signifiant et des sens, l’auteure nous mène au cœur de son « atelier » : la « fabrique du pré » de Ponge n’est pas loin de celle que Jacqueline De Clercq impose à son lexique. L’écholalie préside la fête des vocables.
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A une partie très éclatée succède en fin de parcours le nœud dense des proses.
Le lecteur appréciera, dans la mouvance des modernités poétiques, cette écriture qui place sans cesse son auteure à distance, comme si ce retrait la forçait à dire au mieux ce qui la traverse…
Philippe Leuckx, extrait de la préface
Auteur de Entre solstices et équinoxes
Deux parties, à la fois distinctes formellement et liées par la même thématique : l’espace-temps, donnent à lire une conception de l’art de l’ordre du peint ou de l’écrit. Les peintures de Dominiq Fournal qui rythment les différentes séquences du livre en sont une trace illustrative ; Jacqueline De Clercq s’inspire ici du peintre nabi et historien de l’art Maurice Denis pour qui il convient de « se rappeler qu’un tableau — avant d’être un cheval de bataille, une femme nue ou une quelconque anecdote — est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées ». Elle propose donc un ensemble très structuré : une première partie, Entre solstices et équinoxes,…
Qu’importe le temps quand on aime Voilà pourquoi je me promène Lors de son entrée, en anthologie,…
Pubers, pietenpakkers : relaas / Pubères, putains : récit
Il n’est pas dans les habitudes du Carnet de recenser les traductions d’œuvres littéraires belges francophones vers d’autres langues. Une exception pourtant aujourd’hui tant l’entreprise qui voit le jour constitue une première, un défi relevé et entamé il y a trois ans par Christoph Bruneel, relieur de formation et animateur avec Anne Letoré des éditions L’Âne qui butine. Le pari ? Traduire intégralement en néerlandais un recueil de Jean-Pierre Verheggen, en l’occurrence Pubères, Putains , sans doute l’un des textes les plus connus, les plus aboutis du poète. Un pari assez fou en effet d’autant que Verheggen se plaît à rappeler avec humour que même en français il n’a jamais été adapté, empruntant en cela à Jules Renard sa formule ironique à l’encontre de l’auteur d’ Un coup de dés jamais n’abolira le hasard , « Mallarmé, intraduisible même en français ! » Voilà donc trois ans que le traducteur Christoph Bruneel, lui-même auteur, poète et performeur polyglotte, s’arcboute sur la prose verheggenienne et butine dictionnaires, lexiques et autres grammaires pour apprivoiser la langue sauvage de l’auteur d’ Artaud Rimbur. Outre le soin et l’élégance apportés à l’objet-livre qui constituent la marque de fabrique de la maison, le livre, présenté dans sa version bilingue, donne littéralement une seconde vie à ce texte conçu comme une véritable épopée de l’adolescence.Bruneel aura dû s’accrocher pour contourner les nombreuses embûches et ornières linguistiques qui parsèment le récit. D’un côté, les nombreuses chausse-trappes langagières, les métaphores et autres mots-valises qui voisinent avec les termes issus des vocabulaires les plus spécifiques passant de l’ornithologie à la médecine et que le traducteur aura dû faire siens. Mille exemples peuvent être donnés à l’instar de ces « liparis culdorés », papillons de l’espèce bombyx dont on ne trouve que trois occurrences sur Google et que Bruneel traduit par le superbe et imagé « bastaardsatijnvlinders ». Véritable jeu de ping-pong entre le Capitaine Haddock de nos lettres et le traducteur fou du roi, de nar vertaler !Mais la plus grande prouesse est à chercher du côté du travail effectué sur les sonorités, sur le rythme de la langue que l’on perçoit sans doute le mieux lorsque les deux acolytes se livrent en public à une joute verbale. Il suffit de s’attarder sur le « pietenpakkers » du titre, mot-valise que je laisse au lecteur le soin de décortiquer, pour se rendre compte du jeu allitératif constant du traducteur afin de proposer sa propre vision d’une langue inventive et jouissive. C’est en effet lorsque l’on entend Bruneel dire le texte à haute voix que le résultat est le plus frappant d’ingéniosité langagière et rythmique.Comme il le précise dans sa préface-abécédaire, le traducteur qui s’aventure dans cet univers de dérision et de distorsion langagières doit se laisser aller, à lui de s’éventrer la panse lexicale, d’en découdre et de recoudre mot à mot, son à son, l’ambiance foutraque et à lier. Voilà enfin une lacune comblée, notre Rabelais gembloutois qui s’invite à la table de Vondel, un repas qui ne se refuse pas ! Nous étions des pubères. Des putains. Nous aimions beaucoup les jeux de mains que l’on dit de vilains. Les bains. Les ablutions. Les traîtrises. Les grandes trahisons. We waren pubers. Pietenpakkers. We hielden veel van handtastelijkheden gekend als viezigheden. Het baden. Het afpoedelen. De valsheid. Het…