A été réédité dans le volume «Cosmopolitiques 1» (2003, collection La Découverte en poche)
Auteur de Cosmopolitiques 1. La guerre des sciences
Jamais content ! 15 nouvelles pas comme les autres
Geert de Kockere poursuit sa lancée en nous offrant un second album composé de quinze histoires pas comme les autres. Et c'est vrai que c'est un genre à part, ces petites histoires à caractère philosophique sorties de la bouche d'animaux qui avec un point de vue décalé réfléchissent sur la vie ou l' illustrent à grands traits. De petits animaux jamais contents de ce qu'ils sont et de ce qu'ils ont. Que ce soit une poule qui se met en tête de pondre des œufs carrés, un mouton qui veut devenir chèvre, un renard angoissé par des poules qui le surveillent, le voyage intérieur d'un poisson dans son bocal, une grenouille qui a le vertige, tous ces animaux donnent à penser au sort de la vie, pas toujours comme on voudrait qu'il soit. C'est le rapport à la réalité qui est ici décliné avec ceux qui ne veulent pas la voir, ceux qui la déforment, ceux qui la subissent, ceux qui la sublime, ceux qui l'angoisse….On retrouve les mêmes ingrédients ( une dose absurde, des fins inattendues, des silences, des perspectives peu communes, des rencontres, de la finesse, des questions sur la vie) que le premier album " tête-à-tête" qui nous avait ébloui mais ce sont davantage des moments introspectifs un pouce plus sombre. Pour la réplique du premier, l'auteur belge s'est associé à Johan Devrome qui, après des études d'art plastiques à Bruges puis d'arts graphiques à Anvers, travaille comme créateur graphique pour la télévision flamande VTM et illustre des livres et magazines destinés à la jeunesse. Ce sont des animaux comme posant sur des décors de tapisserie, à la fois tendres, variés et merveilleusement traversés par des sentiments tels que le doute, la naïveté, la déprime, la colère. Voilà un recueil d'histoires à réfléchir, peut-être…
Le chaton qui avait peur de tout
Fortunio le chaton est bien malheureux. Contrairement à son frère Charly, il n’ose pas sauter du toit ni escalader les poteaux... Il a peur de tout. Mais la chouette Minerva, le plus sage des animaux de la forêt, va lui poser les questions qui aident à réfléchir et à prendre confiance en soi pour dépasser…
Nietzsche et la phénoménologie. Entre textes, réceptions et interprétations
La pensée de Nietzsche est-elle la littérature irrationnelle d’un illuminé du 19e siècle ? Puisque cette grossièreté n’est pas tenable, même pour un rationaliste résistant, de quelle pensée s’agit-il ?Si, comme je le crois, l’activité philosophique aujourd’hui reste marquée par les avancées de la phénoménologie de Husserl (en dépit de son idéalisme subjectiviste), de l’ontologie de Heidegger (en dépit de ses dérives nationalistes, de la défense aberrante d’un «esprit» du nazisme à l’antisémitisme) et de la thérapeutique du langage de Wittgenstein (en dépit de son enlisement casuisitique par une trop grande part de la philosophie analytique), l’exigence de penser le monde dans un langage non « métaphysique »est en même temps son enjeu. La philosophie naît et renaît à travers le questionnement radical hors de toute opinion, de tout préjugé, de toute idéologie, à la racine hors de toute métaphysique accrochée à la vérité hors monde. Or ce questionnement, dans sa phase moderne, remonte à l’effort inouï de Nietzsche de penser par-delà bien et mal – par-delà l’opposition entre l’essence et l’apparence, la vérité et l’erreur… L’ Introduction au recueil des Actes du colloque tenu les 16 et 17 mars 2016 à Louvain situe parfaitement cette exigence et cet enjeu. La pensée nietzschéenne du « Schein », littéralement « apparence » ou même « apparaître », peut-elle être rapprochée de celle du « phénomène »? Pas au sens de Kant qui l’oppose à la « chose en soi », ce qui l’englue dans le dualisme. Mais pas non plus au sens de Husserl qui le fonde dans l’ « intuition donatrice originaire ». Cependant si, la « généalogie » nietzschéenne qui arrache les masques des « valeurs » reste sans rapport avec cette « science du phénomène » qui est le projet de Husserl, n’y a-t-il aucun recroisement entre le monde de la vie de l’un et le monde des apparences de l’autre ? Ou encore entre la constitution fictionnelle du phénomène et la perspective interprétative de l’apparence ? La question radicale surgit à partir de là : quel langage introduit à la pensée du monde, au jeu de son devenir, à la « mutation de la temporalisation » comme l’épingle Fink ?Il n’est pas possible ici d’entrer plus avant dans les interventions de ce recueil incisif. Il faut cependant remarquer que, outre les travaux de spécialistes actuels, il reproduit deux textes importants pour l’histoire des interprétations nietzschéennes, l’un d’Eugen Fink, l’autre de Rudolf Boehm, ce qui répond au but de la publication : confronter les interprétations phénoménologiques de Nietzsche à son texte.La stimulation de toutes ces lectures confirme combien la pensée de Nietzsche nous précède toujours, à distance des thèmes canoniques (surhomme, éternel…