Au premier regard, compte tenu du format (à peine 90 petites pages) et de l’illustration de l’emballage (des cornets de frites qui alternent avec un motif typiquement magrittien), on pourrait croire à un énième petit manuel de « savoir-belgiquer », au mieux une sympathique déambulation livresque qu’on pensera à coincer dans son sac-banane entre deux paquets de spéculoos, le temps de pédaler une après-midi entre Le Zoute et La Panne, s’il nous prenait de faire une pause lecture dans le Zwin.Puis, dès la première page, le jugement se trouve réévalué. Bien sûr, on savait depuis le héros brabançon créé par Jean Muno que, chez nous, certaines rues étaient coupées en deux par la frontière linguistique, mais il faut l’avouer, on ignorait…
Edmond Vandercammen ou l'architecture du caché (essai d'analyse sémantique)
À propos du livre (texte de l'Avant-propos) Edmond Vandercammen a publié 22 recueils poétiques entre 1924 et 1977, et une quinzaine d'études critiques; il traduisait depuis les années trente les poètes de langue espagnole; il entretenait des contacts personnels et épistolaires avec de nombreuses personnalités du monde culturel et littéraire, était membre de l'Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique. Plusieurs revues lui ont rendu hommage par un numéro spécial et la célèbre collection «Poètes d'aujourd'hui», aux éditions Pierre Seghers, lui a consacré le tome 124. D'autre part, ses uvres, reçues lors de leur parution avec un enthousiasme sincère, comme la presse et sa correspondance en témoignent, n'ont guère trouvé de lecteurs hors du milieu proche de la vie littéraire et n'ont plus été réédités. Les enquêtes réalisées auprès des libraires de Bruxelles nous ont prouvé que ses livres, dans la mesure où ils se trouvent en librairie, n'ont plus d'acheteurs. S'agit-il simplement d'un phénomène général lié à la situation sociale de la poésie d'aujourd'hui, ou bien la poésie d'Edmond Vandercammen fait-elle objet d'un paradoxe, d'une contradiction qui demande une explication? Son uvre, est-elle liée trop étroitement à son temps, et donc périssable, ou bien le dépasse-t-elle au point que seuls quelques initiés et ceux qui étaient proches de lui ont pu mesurer son importance? Jouissait-elle d'une conjoncture littéraire exceptionnelle des années trente ou des années cinquante, conjoncture dont a largement profité la génération née autour de 1900? Toutes ces questions nous ramènent à une constatation et à une réponse d'ordre général : surestimé ou sous-estimé en même temps, Edmond Vandercammen, s'il n'est pas méconnu, est certainement mal connu. Entouré d'amis, de poètes et d'admirateurs, vivant dans un monde paisible et apparemment hors des conflits et des difficultés que connaît notre société, il a pu s'affirmer, s'assurer une estime et une reconnaissance par-fois trop généreuses pour qu'elles puissent comporter aussi un jugement critique. Excepté quelques analyses approfondies. les articles qui lui sont consacrés témoignent avant tout d'une admiration sincère certes, mais qui n'aboutit pas toujours à une appréciation juste de l'uvre. Si notre but est donc de rendre justice à ce poète mal connu. nous devons tenter un jugement objectif. Et ce n'est pas lui faire une faveur spéciale que de souligner avec lui que juge-ment objectif ne veut pas dire jugement froid, «raisonné», contre lequel, pris à la lettre. il s'est clairement prononcé. Cependant, il nous paraît essentiel de tenter ce jugement objectif à travers ses textes poétiques et de montrer ainsi les correspondances entre l'homme et son univers, entre le poète et son oeuvre, entre la poésie et…
Une revue catholique au tournant du siècle : Durendal 1894-1919
À propos du livre (texte de l'Introduction) Lorsqu'on parcourt une histoire de la littérature belge de langue française, le chapitre consacré à cette époque particulièrement florissante, qui va de 1880 à la première guerre mondiale, frappe par l'éclosion soudaine de revues littéraires qui suivirent l'exemple de la Jeune Belgique. Dans la liste de ces revues plus ou moins éphémères, l'attention est attirée par la longévité surprenante de l'une d'elles, Durendal, revue catholique d'art et de littérature . Ce mensuel catholique parut pendant vingt ans, de 1894 à 1914, alors que la Jeune Belgique ne sortit de presse que durant seize années et que la Wallonie disparut au bout de sept ans. Quelle recette a donc permis à Durendal de garder si long-temps ses lecteurs? Et une seconde question vient à l'esprit : à quoi pouvait bien s'intéresser une revue littéraire catholique à un moment où la littérature catholique semble inexistante? Qui a fondé Durendal ? Quels étaient ses objectifs? Autant de questions sur lesquelles bien peu de critiques ou d'historiens littéraires se sont penchés. En faut-il davantage pour désirer examiner avec un peu d'attention cette revue et la sortir de l'oubli, comme ce fut fait autrefois pour la Jeune Belgique et la Wallonie ? C'est ce que nous allons essayer de faire : rechercher les origines de la revue, découvrir son but, analyser la manière dont elle l'atteignit et les raisons qui la maintinrent en vie au-delà de la durée moyenne d'existence des revues littéraires belges. Ce travail ne se veut pas exhaustif: beaucoup d'aspects devront malheureusement rester ignorés, principalement certains problèmes plus particulièrement artistiques qui sortent de nos compétences par leur caractère trop technique. Nous ne proposerons pas non plus, dans chaque chapitre, un relevé détaillé de tous les articles parus dans Durendal et traitant du sujet mais seulement les extraits les plus significatifs. La présentation typographique de la revue, son illustration de plus en plus abondante et le sommaire de chaque numéro ne nous paraissent pas mériter de longs développements. Il suffit de savoir qu'en 1894 chaque numéro comptait vingt pages, tandis que ce nombre…