Un coffret de carton gris. Une découpe circulaire donne à voir – comme à travers une longue vue – un paysage minuscule : des champs, des maisons et des collines, sous un ciel plutôt bleu. Un ciel bleu d’hiver assurément, le titre le précise. Voyage d’hiver était déjà le titre d’un album en accordéon, un leporello comme disent les érudits, publié chez la même éditrice. Au départ, cet accordéon n’était pas destiné à devenir un livre. Les cartes que renferme le coffret n’étaient pas non plus destinées à la publication : c’est grâce à la clairvoyance et peut-être au goût du risque d’Anne Leloup que ce coffret gris, et ses 44 cartes à histoires, a vu le jour. L’accordéon du Voyage d’hiver dessinait un parcours le long d’une Meuse imaginaire mais crédible. Ici, le voyage s’élargit, se ramifie, s’invente selon les hasards ou les désirs du lecteur, au fil de la manipulation de ces cartes à histoires. Sur certaines d’entre elles, un texte. Sur les autres, une image. Comme il est suggéré, « les cartes s’assemblent par deux, par trois, par séries pour raconter des histoires de voyage, de train et de rencontre ». Le lecteur est donc invité à devenir joueur. Au hasard je « pêche » trois cartes. D’abord un texte, « Le quai de la gare attend, même quand il n’y a personne ». Ensuite deux images de nuit. Sur la première, un quai éclairé par un réverbère avec deux personnages, un adulte et un enfant. Sur l’autre, des caténaires et une maison dont seules deux fenêtres sont éclairées. De quoi rêver, non ?
Voyage d’hiver, 44 cartes à histoires est un livre-jeu à qui il est difficile d’assigner un « niveau ». Il parle à tous les âges de la vie. Et même si vous ne vous sentez pas l’âme d’un lecteur-joueur, vous aurez sans doute plaisir à vous promener, carte après carte, à travers les lieux captés par Anne Brouillard. (Maggy Rayet)