Nous qui découvrons les albums d’Ingrid Godon grâce à leurs versions françaises, nous avions déjà fait la connaissance d’un petit garçon prénommé Léo. C’était dans Léo et… publié à la Joie de Lire. Le texte, traduit par Maurice Lomré, portait la signature d’Imme Dros, une grande dame de la littérature de jeunesse aux Pays Bas. Léo y fêtait son premier anniversaire, vivait sa première neige et posait ses premières questions à la lune. C’est un Léo un peu plus grand que l’on retrouve chez Pastel avec les mots de Carl Norac. Ce n’est pas la première fois que les noms d’Ingrid Godon et de Carl Norac sont ainsi associés. Rappelez-vous Le géant de la grande tour, Mon papa est un géant, Une maman c’est magique, ou encore Le concours de bisous. Un ours et moi, et moi, et moi se déroule en une journée, « une sacrée bonne journée ». En tous cas c’est ce que Léo espère en se disant bonjour dans le miroir avant de partir à la découverte du monde. Mais – déception – personne ne fait attention à lui. Ni sa sœur, ni la petite voisine, ni la pluie qui tombe, ni la rivière qui déborde. Léo est de plus en plus persuadé que le monde entier lui tire la tête. Or, voici qu’il tombe nez à nez avec un ours. Placide et bienveillant, ce dernier – oh surprise – semble s’intéresser au petit garçon. Et le lecteur comprend que tout compte fait ce fut vraiment une « sacrée bonne journée ». Pour Léo… et pour l’ours aussi. Même si, de retour en ville avec cet énorme plantigrade qui sème la panique, Léo a encore du mal à admettre que toute cette agitation n’est pas de sa faute et que ses proches l’aiment très fort.
On évoque souvent et à juste titre la qualité du trait d’Ingrid Godon, un trait épuré et qui va à l’essentiel. Regardez par exemple ses visages : en deux points et quatre traits, elle réussit à les faire « parler », à exprimer toute la palette des émotions. Sur la même longueur d’onde que sa complice, les mots de Carl Norac, eux aussi vont à l’essentiel. (Maggy Rayet)