Image de l'oeuvre - Notre ami Lépi

Notre critique de Notre ami Lépi

L’autre jour, alors que je me promenais entre les rayonnages d’une librairie bruxelloise, je suis tombée sur un magnifique album jeunesse. La couverture rose, le format agréable en main, la palette de couleurs, le dessin, tout me donnait envie de le lire. Je l’avais feuilleté et j’avais écrit son titre dans les notes de mon téléphone, pensant que je tâcherais de me le procurer une prochaine fois.

Quelques jours plus tard, je recevais un mail de Marie Baurins, qui me proposait de m’envoyer un exemplaire de Notre ami Lépi, de Marina Philippart, pour en faire une critique pour Objectif plumes. Quelle chance ! C’était l’album sur lequel j’avais flashé.

Notre ami Lépi, c’est l’histoire de deux frères, Sève et Racine, racontée du point de vue de l’aîné. Ils vivent seuls sur une terre hostile et brumeuse où ne pousse que la mousse. Pour occuper leur vie bien morne, ils boivent du thé et tournent les pages d’un grand livre plein d’images de choses qu’ils n’ont jamais vu. Parfois le brouillard est si dense qu’ils restent des jours enfermés dans leur grotte. Alors le petit frère, Racine, rêve des enfants des mousses, ces petites créatures bienveillantes qui lui indiquent les lieux sans brouillard. Ainsi survivent-ils, collectant et mangeant de la mousse… Jusqu’à ce qu’un jour, en haut d’une montagne, ils découvrent un insecte géant blessé à l’aile. C’est un papillon de nuit, un lépidoptère, ils le reconnaissent car il figure dans le livre d’images. Les deux frères le soignent en utilisant des mousses médicinales et deviennent amis avec lui. Ils l’appellent Lépi.

Malgré les soins, Lépi faiblit. Avec l’aide des enfants des mousses, Sève et Racine performent un rituel qui permet à leur ami de reprendre son envol. Ouf ! Lépi invite les frères à voyager sur son dos et ils partent tous les trois explorer le monde. L’horizon s’agrandit.

C’est un album très mystérieux ! L’histoire n’est pas banale et l’univers assez sombre aux premiers abords pour un livre jeunesse. Pourtant, c’est aussi un album très doux. C’est dans ce clair-obscur que naît la poésie de Notre ami Lépi. On le comprend visuellement au contraste des couleurs, sombres et lumineuses, et aux personnages étranges et mignons à la fois, avec leur bille de clown et leur grands yeux noirs.

Le livre déborde d’idées ingénieuses qui rendent le récit attendrissant : la théière en forme de chat, le gros livre d’images, la collection de mousses dans de jolis flacons, les petits pots remplis de larmes, les enfants des mousses (qui m’ont fait pensé aux sylvains, ces esprits de la forêt dans Princesse Mononoké)… Tout ceci contribue à l’ambiance unique et délicate de Notre ami Lépi.

Je me suis arrêtée plusieurs fois dans ma lecture pour savourer les illustrations, les paysages peints, francs et beaux, la mise en page variée… Et j’ai beaucoup apprécié le détail des cartes en pages de garde, qui font partie intégrante de la narration. Sur la page de garde du début, la carte représente la connaissance limitée qu’ont les deux frères de leur environnement. Sur la page de garde de fin, la carte montre toutes les découvertes géographiques qu’ont faites les deux frères grâce à leur ami papillon.

Cet album parle d’isolement et de solitude mais aussi, grâce à la rencontre avec le papillon, de la joie que procure une nouvelle amitié et de la réalisation que le monde est plus vaste et beau qu’on ne l’imaginait.

Un joli album, doux et poétique.

Nausicaa Gournay