Entre conte macabre et road trip historique, Macrales et Corbeaux suit deux prêtres chrétiens au sortir de la révolution.
Durant l’hiver 1794, la Révolution française est encore bien fraîche dans les esprits. Son message infuse lentement dans la société. En Wallonie aussi, l’événement a des retentissements. Les sites chrétiens sont pillés et saccagés. Les églises terminent en cendres et les prêtres sont chassés.
Ainsi, Martin et Antoine deux ecclésiastiques décident de fuir en emportant les reliques de leur ordre monastique. À la façon des légendes, les Macrales sont envoyées à leurs trousses. Ces sorcières du folklore wallon terrifient les deux hommes. L’angoisse qu’ils vivent en tant qu’ecclésiastiques au vu des récents évènements est représentée par celles-ci.
Ghi, un jeune auteur de 26 ans, diplômé de l’Académie des Beaux-arts de Namur, sert un premier roman graphique qui se lit tambours battants. Avec un scénario qui fleure bon l’ancrage local, il fait vibrer les passionnés de paysages belges. Mais c’est sans doute son dessin qui nous charme surtout. Un bel exercice de style où l’on retrouve l’équilibre entre maîtres classiques et une dose de modernité. Martin et Antoine ont donc un vrai caractère au sens esthétique du terme. Sur leurs visages, les traits de l’histoire se marquent comme des stigmates des événements qu’ils vivent. Le regard sombre qu’ils posent sur leur vie mine désormais chaque instant.
On découvre un récit en nuances où les personnages se détachent des stéréotypes qui pourraient leur coller à la peau. La violence est quotidienne dans tout monde en bouleversement. Les deux héros ne sont dès lors que les victimes de l’histoire qui avance sous leurs yeux.
Alors, si les histoires de sorcières ne vous effraient pas. Et que l’histoire, tout court, est votre dada, plongez dans cet album.
Clément Fourrey