Image de l'oeuvre - Le voyage d’Irma

Notre critique de Le voyage d’Irma

Bien installée dans la salle d'attente de la porte d'embarquement d'un aéroport, Irma se réjouit de découvrir des récits d’ailleurs. Elle part faire un voyage lointain pour retrouver un groupe d’amis conteurs.
Avez-vous déjà vu une joyeuse équipe d'animaux bourlingueurs conduire un van ?
C'est cheveux aux vents que nous embarquons dans ce road trip graphique, avec pour compagnons de route Léon, Simone, Ernesto et Andréa. On entend presque la radio et les amis chanter à tue-tête dans cette virée au volant.

Sur l'itinéraire de la route des vacances, cette galerie de personnages a plein d'histoires à raconter. Le voyage d'Irma est un livre à tiroirs, où un premier récit en dévoile d'autres.

Tour à tour, les animaux amis prennent le « lied » de déclamer aux autres une histoire.

Nous allons découvrir “Souffle”, “Les parapluies” et ”Petite souris”.

Irma ne sait pas si elle osera se mettre en scène et raconter, elle aussi.

Au fil des pages, nous admirerons les paysages constitués d’aplats aux épais traits de marqueurs avec cette joyeuse équipe d'animaux bourlingueurs. Les personnages, quant à eux, sont dessinés au crayon gris avec beaucoup de détails. Ce mélange de deux techniques qui ne sont pas évidentes à associer balade nos yeux dans des contrastes inattendus. La palette de couleur est douce, lumineuse et légèrement mélancolique.

Pour son premier livre, Mathias Baijot déploie la plupart du temps ses illustrations sur les doubles planches, il orchestre ses compositions avec une étonnante liberté. Chaque image est sans cadre et s’étend jusqu’au bord des pages, ce qui nous installe en tant que lecteurs au plus proche des personnages. En tournant les pages du livre, on découvre un rythme particulier, on ne sait jamais ce qu'on apercevra après le prochain virage.

Dans Le voyage d’Irma, nous sommes les touristes d'un espace narratif mystérieux.

Mathias Baijot nous emmène dans un subtil jeu d'ellipses durant 144 pages, où l'on se rend compte rapidement, au moyen de l'agencement des séquences, que le voyage a pris une direction inattendue.

Le voyage d'Irma est fait d’escales cotonneuses, aériennes même, c'est avec douceur et délicatesse que l'auteur aborde la question d'une disparition soudaine. Le voyage est suspendu le temps d’une convalescence où les souvenirs, les faits et les songes s'entremêlent.

Irma murmure à notre regard des silences et du chagrin, mais aussi de la résilience. Elle fantasme autour d’une boule à facettes, accessoire essentiel pour retrouver des éclats de lueur au milieu de la nuit.

Un livre singulier dans lequel l’auteur glisse une ode à l’amitié et aux histoires à “disperser”.

Romane Armand