Les amateurs de théâtre en Belgique connaissent peut-être Vincent Zabus. Ce touche-à-tout S’attache à diffuser la littérature sous plusieurs formes. Comme metteur en scène et comme comédien d’une part, comme scénariste de bande dessinée d’autre part. Conteur sur les planches, de théâtre comme de papier, Vincent Zabus nous a déjà donné à lire quelques pépites. On se souvient de lui notamment pour « Les Ombres », une fable sur le difficile parcours de l’exil, ou pour « Mademoiselle Sophie ou la fable du lion et de l’hippopotame », une histoire de tolérance, dans laquelle chacun quel qu’il soit trouve sa place.
Note compatriote namurois est aujourd’hui accompagné de Sara Del Giudice, illustratrice milanaise, pour ce nouvel album. Elle est notamment connue du grand public pour un album intitulé « Derrière le rideau » (Dargaud, 2022), qui narrait « Le Journal » d’Anne Franck.
Le duo propose, en cette rentrée, un album intitulé « La semaine où je ne suis pas morte », publié aux éditions Dargaud.
Juliette, une jeune fille de 16 ans, intelligente et pleine de créativité, a du mal à trouver sa voie. Entre repli sur soi et harcèlement scolaire, elle ne sait pas trop comment sortir de la déprime du quotidien. La seule chose qui la maintient est un sens aigu de l’esthétique. Juliette est une artiste qui ignore quelque peu son talent. Elle aime la nature et les balades en forêt. Alors qu’elle se pense seule, elle rencontre un jeune garçon qui, comme elle, aime le dessin. En pleine nature, il réalise une esquisse. La jeune fille, intriguée, décide de découvrir d’où peut venir l’inconnu. Quand elle se rend compte qu’il fréquente le même lycée, son monde s’ouvre. Un bol d’air contre la morosité s’installe.
Vincent Zabus nous emmène à nouveau dans un conte initiatique rempli d’humanisme et de bienveillance. En se penchant sur les problématiques de société et sur ce que vivent les jeunes, il offre des pistes de réponses et de débats. En effet, le harcèlement scolaire et l’isolement des jeunes ne peuvent que nous alerter. La société vit un repli sur soi, dont les adolescents sont les premières victimes. Alors qu’ils tentent de construire leurs personnalités, les jeunes se retrouvent confrontés au regard de l’autre. Avec un sens de l’altérité qui n’est pas encore complètement affirmé, certaines et certains peuvent aisément vaciller quand ils ne se reconnaissent pas dans les attentes d’autrui.
Pourtant, la sensibilité à l’art est une belle qualité. Et le talent se construit par la critique et la dialogue avec ses pairs. C’est donc bien difficile pour notre jeune héroïne d’évoluer. Introvertie, elle vit dans un perpétuel malaise. Il lui faut donc trouver des repères quotidiens pour échapper à ce qui la ronge. Au fur et à mesure, Juliette arrive à se retrouver et à accepter ce qu’elle est. Par là même, elle échappe à une logique de mort. En effet, la jeune femme a une vision bien sombre de l’avenir et des tendances suicidaires.
Par touches impressionnistes, Vincent Zabus et Sara Del Giudice nous proposent une histoire touchante. Avec ce récit fait de douceur et d’humanisme, ils tentent d’attirer l’attention sur les souffrances des adolescents. On ressort de cette lecture avec une envie d’être plus présent pour l’autre et plus attentif au bien être d’une jeunesse en perte de sens.
Mais on n’en attendait pas moins de la part du conteur qui sait trouver les mots justes !
Clément Fourrey