Notre critique de Entre elles

Entre elles, un été aux douceurs colorées, où l’amitié se révèle être plus épineuse et instable que prévus.

En plein deuil de sa grand-mère, Judith, le cœur lourd, a du mal à contenir son chagrin. Elle aurait préféré ne pas être là. Mais elle y est, elle vient d’arriver dans un beau château pour deux semaines de stage d’anglais avec plein d’autres jeunes adolescentes de son âge. Heureusement, elle y retrouve Virginie. Toutes les deux elles sont soudées autour d’un MP3 partagé, deux casques, un même morceau, dans leur bulle. Malgré elle, c’est dans cette bulle que Judith espérait pouvoir se réfugier.

Cependant Virginie, plus solaire, plus extravertie et peu intéressée par les cours d’anglais, est rapidement intégrée à un groupe de filles populaires qui l’entraînent dans leur dynamique de bande. Fidèle à son amie, elle pousse Judith à la suivre, mais ce n’est pas ce dont cette dernière a besoin. Judith se retrouve alors dans un environnement hostile où son mal-être devient la cible de moqueries. Un jeu de type « action ou vérité » dérape, une blague va trop loin, et l’atmosphère s’assombrit. La fracture entre les deux amies devient inévitable. Influencée par le groupe et impitoyable, Virginie quitte la chambre et finit par prendre part au harcèlement que subit Judith. Comment se détacher de ce groupe toxique ? Comment passer outre ces mots qui heurtent ?

L’histoire nous montre qu’au-delà de la trahison et de la solitude, il est possible de se reconstruire et de trouver sa place en tissant des liens de sororité.

À cela s’additionne sûrement pour Judith une première rencontre avec la mort, celle de sa grand-mère, laissant un vide qui n’est pas facile à accepter. Comment dire au revoir à sa grand-mère ? Comment trouver une forme de soulagement à ses sanglots qui viennent prendre toute la place ?

Pauline Spira nous plonge de sa propre adolescence, dans des souvenirs que plein d’autres ont pu vivre, dans une série de roller coster amicale. À fleur de peau, les émotions chatouillent, démangent et écorchent ces corps en plein évolution. L’enjeu étant de réussir à panser ses blessures pour passer à autres choses. L’univers adolescent est sensible et parfois cruel ou le relationnel est un apprentissage permanent. Ici nous est raconté ce passage inconfortable et obligatoire rempli de moments de bascule où l’on cherche à appartenir, à s’échapper, à se trouver. Cette aventure au féminin nous en fait voir de toutes les couleurs.

Éléonore Scardoni