Image de l'oeuvre - À contresens

Notre critique de À contresens

Chaussée de petits bottillons rouges, son skate sous le bras, une jeune fille monte sur ce dernier et s’élance. Elle roule, cheveux au vent sous un bonnet rouge, et son chemin la mène sur la route, les collines et en ville (Londres ? car on y reconnaît le Swiss Re Building), elle va à contresens, celui de la lecture mais aussi celui de tous ceux et celles qu’elle croise. En fin de journée, elle rentre chez elle, où l’attend sa maman et ensemble elles repartent sous la douce lumière de la pleine lune et la protection des étoiles.

Le texte, qui se limite le plus souvent à une phrase par double page, est une ode à l’émancipation, la liberté, la solidarité. Il propose aux enfants de s’ouvrir, de déployer leurs ailes, de bâtir des ponts, de briser les murs et de franchir les frontières. C’est un texte poétique et puissant, rassurant aussi. A l’observation attentive des dessins, on remarque que l’auteur-illustrateur y a caché de nombreux femmages, à Kae Tempest, Rosa Parks, Kathleen Hanna (chanteuse du groupe El Tigre) et sans doute bien d’autres que je n’ai pas su découvrir. On retrouve aussi Superman, Godzilla, King-Kong et un possible hommage à Richard Scarry et son asticot au chapeau tyrolien. Un détournement de la pochette Abbey Road des Beatles est aussi présent, les membres du célèbre groupe de Liverpool étant remplacés par un adulte en costume, suivi par trois enfants et une souris somnambules ou alors ce sont les victimes du joueur de flûte de Hamelin qui suivent aveuglément un homme blanc en costume représentant le consumérisme et/ou le capitalisme ?

L’illustrateur a pris comme particularité de laisser visible différentes trames, ce qui donne une profondeur et un relief à ces personnages et paysages. Il y a un petit côté très géométrique dans les illustrations, quadrillages pour les barrières et les immeubles, lignes horizontales pour de nombreux habits, rectangles ou carrés pour les fenêtres et les portes, rond pour les roues du skate, des véhicules, du soleil qui se couche ou de la lune qui se lève, le tout pimenté de surprises visuelles comme ce chat chapeauté muni d’une guitare, cette souris transportant un morceau de fromage sur le dos, ces pigeons coiffés d’un melon ou ces escargots qui ont littéralement une maison sur le dos.

Chaque relecture vous fera découvrir de nouveaux détails. Un futur classique.

Joëlle Froment