« Et puis sans crier gare », quelque chose survient, là, dans le cours de l’existence, quelque chose comme une aspiration au voyage, une arrivée surprise, une brisure dans le quotidien, dans la fuite des jours comme ils sont et s’en vont. Une perturbation qui remet les pendules à l’heure ou les dérègle pour longtemps. À tout jamais ? Quelque chose qui réjouit, inquiète ; qui met à mal, à bien ; qui emporte au bout de l’autoroute, face à la mer, en compagnie de deux jeunes autostoppeurs opportunément chanteurs, ou qui ramène à la ville, parce qu’un être du règne animal brait toutes les nuits et empêche le sommeil de s’installer dans la maison de campagne tant souhaitée, tant transformée pour ressembler aux fantasmes (stéréotypes) d’un repos sûrement…
Toutes les nouvelles du dernier recueil de Bruno Marée paru aux éditions Quadrature – éditions totalement dédiées à la nouvelle de langue française – semblent respecter (et jouer d’) un même cadre narratif. Elles commencent par poser la singularité, voire l’étrangeté, du quotidien (ou de l’hebdomadaire) d’un ou plusieurs personnages, et ce généralement en une phrase : « Je vois des choses qui n’existent pas » (qui pourrait presque définir le travail de ce nouvelliste, mais il faudrait alors préciser : mais pourraient exister, car nous ne sommes pas dans un univers fantastique ou de science-fiction) ; « Ils s’entendent comme chien et chat, dans le plus grand respect des traditions » ; « Je ne me douche jamais » ; « Le problème de monsieur Christian,…