La poésie contemporaine (soit celle qui est signée par des vivants) est devenue un objet encombrant au XXIe siècle. Personne ne la lit, a fortiori personne ne l’achète, et elle ne pullule encore, invisiblement, que parce que certains éditeurs qui se lancent dans ce créneau profitent de naïfs prêts à se faire publier à compte d’auteur, pour au final n’être ni diffusés ni promotionnés. Bien sûr, il y a l’oralité, circulant dans les cabarets littéraires ou les soirées de lecture entre coteries d’initiés ; mais aujourd’hui, en librairie, où se cueillent Les Fleurs du mal, où se gausse-t-on des Amours jaunes, et où La nuit remue-t-elle ?Alexis Alvarez a su creuser son trou (noir, évidemment) dans cette nébuleuse surpeuplée de satellites égarés, d’éphémères…
Quasi-corollaire de tout début vu que « pour absolument tout dans la vie, marcher, respirer, boire du vin ou se faire pipi dessus, il y [a] une première et une dernière fois », elle peut enliser, empoisser, embourber, comme oxygéner, alléger, stimuler. Elle rebat en tout cas immanquablement les cartes, qui façonneront d’autres châteaux à l’architecture espagnole ou végéteront en tas informe sur une table crasseuse. La fin d’une relation, et plus particulièrement d’une relation amoureuse, c’est notre lot à (presque) tous, un jour ou l’autre. Si l’expérience s’envisage comme banalement commune avec une distance poético-cynique, moins fréquents sont ceux qui la ressentent comme telle à l’instant T et à tous les autres qui suivront et s’accumuleront le temps…