Pendant dix ans j’ai voyagé, traversé quarante pays, écrit des centaines de feuillets. Des textes courts retraçant au jour le jour mon parcours. C’était au début des années 2000. Je tenais un « blog ». Cela ne s’appelait pas encore comme ça. En route, rien n’était alors techno-simple comme aujourd’hui. C’était un carnet de voyage, un journal de bord en lignes par milliers. Je me suis parfois demandé que faire de tous ces textes intimes et exotiques. Faudrait-il les retravailler pour publier ? Sur la passerelle, un clochard sans prénom me parle de ma barbe. Timotéo Sergoï m’apporte enfin la réponse, dix années ont encore passé, nos mentons en fouillis et c’est non ; sans doute ni regret. Un non de soulagement. J’ai trouvé mon maître. En matière d’impressions…
Cinq parties divisées chacune en douze déchirures, douze lames, douze éclats, douze failles fracturant le tissu du monde, la cartographie d’un monde avalé dans l’immonde : partant d’une question liminale « Où en sommes-nous ? », le recueil poétique Apocapitalypse interroge la place de la poésie, du poète, leur connexion avec une insoumission native. Écrivain, poète (Le tour du monde est large comme tes hanches, Le diagonaute amouraché, La solitude du marin dans la forêt, Blaise Cendrars, brasier d’étoiles filantes…), comédien, marionnettiste, voyageur, Timotéo Sergoï se place au point de rencontre entre poésie et révolution.Ne me demandez pas comment je vais. Allez plutôt leur dire que tout s’écroule. Que le soleil s’enfuit. Les rossignols ont peur (…)…
— Bonjour, jeune homme, quelle jolie terrasse vous avez ici !— Merci madame. Je vous en prie, installez-vous. Permettez-moi de vous confier le menu.— Merci. Nuit. Bruit. Fruit. Joli nom d’établissement… Quelle sont vos spécialités ?— Neuf infusions de phrases selon neuf recettes locales, madame. Chaque infusion est un chapitre au menu et se compose d’ingrédients poétiques ayant la forme d’aphorismes ou de jeux avec les mots et les pensées. C’est souvent ludique et vous en apprécierez chaque gorgée car chacune a son propre parfum selon ses propres épices.— FoOormidable ! Dites-moi tout pour m’aider à choisir, voulez-vous ?— Certainement. La première offre est plutôt philosophique et s’illustre par Le poids de l’aile c’est son ombre.— Mmmm… oui,…
Le vers de Hölderlin, « pourquoi des poètes en temps de détresse ? », ne cesse de sauter de siècle en siècle, de convoquer les poètes à y répondre, à tout le moins à s’y affronter. Figurant dans le poème élégiaque « Pain et vin », ce « Wozu Dichter in dürftiger Zeit ? » se décline sous la plume de Timotéo Sergoï. Que peut la poésie face au covid-19, quelles ressources individuelles et collectives nous propose-t-elle lors des confinements ? Comment une poésie hors quarantaine peut-elle déconfiner les corps et désincarcérer les esprits ? Durant les cinquante jours de confinement s’étalant du 20 mars au 8 mai 2020, le poète, comédien, artiste, voyageur Timotéo Sergoï a lancé à près de deux cents personnes un poème-gravure quotidien, un objet poétique,…
À chaque seconde, il y a un fou qui naît, à chaque seconde, il y a un sage qui meurt. (1, 2, 3 secondes.) À chaque seconde, deux animaux s’embrassent, à chaque seconde, les adultes s’en moquent. (1, 2, 3 secondes.) À chaque seconde, un cosmonaute rit, à chaque seconde, un scaphandrier pleure et plonge dans ses larmes. (1-2-3) (…) À chaque seconde, un couple se déchire, à chaque seconde, tu ne me manques pas. (1-2-3) Que tes éclats de rire. (4-5-6) Et tes mains dans le noir. (7-8-9) Et ta bouche, quelquefois. (10-11-12) Je t’attends sous l’horloge.Timotéo Sergoï ? Déjà entendu parler ? Non ? Moi, j’imagine ceci : Timotéo Sergoï voyage, va partout dans le monde, à Melbourne, Sydney, Moscou, y montre ses marionnettes, y vit sa vie d’homme…
Poète voyageur « aux semelles de vent », arpenteur de la poésie du cosmos, grand errant du verbe sauvage, Timotéo Sergoï n’a jamais pactisé avec les écrivains institutionnels, cotés en bourse, avec les assis et les fondés de pouvoir du poétique. Dans son dernier recueil poétique Marcher loin des écrans fait de nous des oiseaux, il délivre un protocole d’action poétique qui prend la forme d’un texte s’étirant sur 801 kilomètres. L’exergue condense la visée du voyage géographique, esthétique et politique : « 801 km de poésie / pour un marchand de yaourt / qui a voulu changer le monde ».Rupture avec le joug des routines, opération de guérilla, plastiquage des formes d’oppression du néolibéralisme et du dire-penser qu’il impose… marchant durant deux…