Les fleuves sont de redoutables pourvoyeurs de poèmes ! De Rimbaud qui en descendait les rives impassibles, aux poètes contemporains comme Jacques Darras ou Franck Venaille, ils auront charrié, dans les remous de leurs rimes ou dans la vase de leurs métaphores, de nombreux vers éternels et imparables. Mythique ou réel, le fleuve porte littéralement le poème à bout de bras. Avec ce nouveau recueil, Philippe Mathy rejoint cette lignée de poètes-nautoniers ! Partageant sa vie entre le Tournaisis et la Bourgogne, le poète balance son amarre de l’Escaut à la Loire.
De la frontière française à Antoing, l’Escaut est un monsieur sérieux, en costume gris. Il avance sagement sur un chemin tracé. […] Ici, à Pouilly, la Loire est une jeune fille espiègle qui se déhanche…
L’aube à peine effacée vite passée comme l’enfance
Le temps de goûter aux parfums des jours blancheur de l’aubépine
Ce sont tant de haies dressées comme des murs dans le labyrinthe de vivre
et déjà le crépuscule s’avance
Si la vie « linéaire » est faite de l’alternance du jour et de la nuit, c’est une autre temporalité que révèle le recueil Battements crépusculaires de Philippe Mathy et André Ruelle. Le livre donne en effet à éprouver une dimension temporelle confinant au cycle cardiaque de la systole et de la diastole, comme en accordéon – à l’image du nom de la collection des éditions Tétras Lyre (qui a récemment fêté ses trente ans) dans laquelle s’inscrit ce livre. Cette temporalité est celle des « lézards /…
Dieu sait combien certains paysages sont propices aux promenades silencieuses, à la contemplation et à la réminiscence. Le paysage des îles de la Gargaude, modulé par la Loire, en est un. Du moins, c’est ce dont rend compte ce recueil issu de la collaboration entre le poète Philippe Mathy et l’aquarelliste Anne Le Maître, publié dans la collection « Carnets de Nature » des Éditions de l’Atelier des Noyers. Les circonstances de la rencontre entre Le Maître et Mathy, formulées à la fin de ce petit livre,participent à la douceur de l’ouvrage : fruit d’une rencontre entre l’artiste et l’écrivain au début de l’été 2017, ce livre aura mûri au fil des saisons et est offert au regard à l’automne 2018. Voilà qui tombe à point.
Qui tombe à point, car…
« La culture de la poésie n’est jamais plus désirable qu’aux époques pendant lesquelles, par suite d’un excès d’égoïsme et de calcul, l’accumulation des matériaux de la vie extérieure dépasse le pouvoir que nous avons de les assimiler aux lois intérieures de la nature humaine »[1]. Tous les hommes sont des poètes, dans la mesure où ils éprouvent le besoin d’exprimer et de reproduire leurs émotions dans un certain rythme. Si le poète est l’homme imaginatif par excellence, son influence sur les lecteurs et sur toute la société sera déterminante, quoique imperceptible à l’œil nu, soutient le poète romantique anglais : « Les poètes sont les législateurs non reconnus du monde ». Sous cet emblème, Philippe Mathy poursuit, depuis Promesse d’île (1980)…
Constitué de sept sections, chiffre symbolique s’il en est, présent dans de nombreuses cultures, désignant l’absolu, la totalité, l’émergence d’un monde nouveau et l’union des contraires, le présent recueil de Philippe Mathy, rehaussé de gouaches sur papier du peintre André Ruelle (Charleroi, 1949), s’inscrit dans l’esthétique habituelle du poète, avec toutefois une tonalité plus noire, plus dramatique pour les poèmes écrits pendant une résidence d’écrivain à Verdun ainsi que pour ceux de Jours de cendre. Dans le vent pourpre ; Dehors, mains ouvertes ; Rive de Loire et Belle-Ile s’offrent comme des suites renouant avec une méditation sur la beauté de la nature, méditation non dénuée de gravité, sur la sensibilité et l’ouverture à l’autre, sur…