Deux kilos deux renferme tous les ingrédients du premier roman réussi : de l’originalité, de l’audace, du style ; des défauts aussi, ceux dont on dira qu’ils sont « de ses qualités ».Les premières pages campent une atmosphère à la Hopper, états-unienne à souhait, avec ses personnages estampillés Molly, Jo, Werner ou Earl, clairsemés sur les banquettes et les tabourets du Papy’s, un de ces diners isolés où la serveuse vient vous reverser du café à table toutes les demi-heures si vous n’avez pas choisi l’option milkshake. Une monstrueuse tempête de neige est annoncée « dans le poste », il va falloir se préparer à affronter les éléments et roder les pick-up dont le froid menace de gripper le moteur sur le parking…Le coin du monde balayé par les…
Les photos qui introduisent le livre donnent un ton très clair : percée d’une voie ferroviaire en pleine forêt, engin pulvérisant de l’astrazine sur un champ, parcs à bestiaux pour abattoir, élevage fermé de poulets et une ahurissante colline de crânes et d’ossements de bisons. Le hantement du monde est celui des milliards de cadavres de vies animales que nous laissons derrière nous, tâche que nous poursuivons sans intermittence aux fondements de notre vie quotidienne.Rapidement, de virus, prions et zoonoses à nausées, le dégoût d’une répugnante évidence pénètre l’esprit du lecteur, en même temps heureux de trouver ici les mots et l’énoncé de ce qui nous arrive aujourd’hui dans un interminable désordre. Le COVID-19 et ses variants ne sont qu’un chapitre…
On peut n’avoir jamais connu l’odeur d’une tranche de pain brûlé noir de chez noir (parce que sur l’antique grille-pain de vos arrière-grands-parents encore utilisé, les tranches ne sautent pas, il faut les retirer à temps), et ignorer le nom de Lautréamont (« Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie », citation iconique chérie des surréalistes), et néanmoins, se plonger avec curiosité dans ce livre qui évoque l’archéologie, l’usage et les normes qui régissent une grande partie des objets – et notre vie quotidienne.C’est ce à quoi s’attellent deux historiens et universitaires, Gil Bartholeyns (également romancier, auteur de Deux kilos deux, une enquête sur l’élevage intensif de volailles…
Gil BARTHOLEYNS, L’occupation du ciel, Payot & Rivages, coll. « Rivages/Imaginaire », 2024, 260 p., 21 € / ePub : 15,99 €, ISBN : 9782743662424Après Deux kilos deux en 2019, Gil Bartholeyns revient à la fiction et signe, avec L’occupation du ciel, une remarquable entrée des plumes francophones dans la jeune collection Rivages/Imaginaire. Orientée vers les fictions aux accents prospectivistes, la collection vise à promouvoir les regards singuliers sur le futur de l’humanité. Elle apparaît ainsi tout indiquée pour accueillir ce roman d’anticipation particulièrement marquant où se mêlent avec une parfaite maîtrise drame intime et techno-thriller haletant.On y suit Clay Sawyer, seul survivant d’une très coûteuse mission sur Mars dont le succès devait préfigurer…