Dans notre monde où, depuis une vingtaine d’années, le cinéma nous donne accès à ses chutes, la curiosité croît envers les repentirs de la littérature. L’archive littéraire devient un réservoir à pièces détachées inédites et authentiques, offrant de la nouveauté dans un répertoire dont les amateurs pensaient tout savoir. On connaît l’attrait commercial de l’entreprise ; on connaît également son versant documentaire, permettant d’étendre la compréhension de l’œuvre, d’approfondir son analyse, d’en explorer des pans méconnus.
François Emmanuel est un écrivain du tâtonnement, qui s’autorise l’errance jusqu’à ce que celle-ci lui permette d’aboutir au ton juste. Chaque roman, chaque pièce, chaque poème se distingue ainsi dans sa singularité.…
François Emmanuel n’est plus à présenter. Depuis près de trente ans, son œuvre se déploie et elle forme aujourd’hui un ensemble impressionnant. Déclinée en pièces de théâtre, romans, essais et nouvelles, elle a imposé avant tout une plume au service de la subtilité et qui se met au chevet des âmes de ses personnages. Dans son nouveau roman Ana et les ombres, l’auteur, psychiatre de formation et de métier qui ne se perd jamais en diagnostics et qui semble avoir renoncé à jamais nommer quelque forme de pathologie ni surtout à y enfermer ses personnages, explore les coulisses du mal-être pour nous livrer la part d’irréductible humanité qui se trouve au cœur des blessures qui empêchent de vivre pleinement.Comme souvent, sa narration s’inscrit dans le cadre d’un…
Si la passion n’est pas héréditaire et semble due à quelque fatum, elle peut se transmettre de génération en génération. Chez les Savinsen, le modèle passionnel va de la nostalgie hallucinée du grand-père Tobias à sa petite-fille Jeanne en passant par la mère qui vivra un amour interdit et en mourra. L’histoire présente se déroule pendant la deuxième guerre mondiale. Jeanne, l’héroïne, restée seule responsable du château familial depuis la mort de sa mère et la déportation de son père, doit affronter la réquisition du domaine par les Allemands. Cette intrusion subite entraîne un désordre matériel mais surtout un bouleversement des sentiments et déclenche un afflux de souvenirs chez la jeune fille : l’officier occupe la bibliothèque où son père entomologiste…
L’on sait François Emmanuel fin observateur des relations humaines ; qu’il s’agisse d’un couple ou d’une famille complète, il sonde les âmes et nous en rend compte avec une infinie subtilité. Ses personnages interagissent vivement avec le monde qui les entoure, en ressentent les contradictions, mettent à l’épreuve les limites des lois des hommes, de leur morale, et cette sensibilité les rapproche inexorablement de leurs semblables en proie aux tourments.Ici, il met en scène les semaines qui suivent l’assassinat de Pierrot, le grand frère de Yann et père de la jeune Loum qu’il laisse dépourvus. Ne leur avait-il pas donné des signes de ce qu’il se savait en grand danger, ne s’est-il pas offert aux balles qui ont criblé son corps ? Dans une lettre d’adieu que…
François EMMANUEL, Raconter la nuit, Seuil, 2022, 256 p., 19 € / ePub : 13,99 €, ISBN : 978-2-02-149348-1Pierre, le narrateur, reçoit une lettre de Vera, une femme qu’il a connue étant adolescent, mais c’est le visage de sa sœur jumelle Jelena qui s’impose dès la première phrase de ce nouveau roman de François Emmanuel :Et sans doute l’histoire tiendrait au seul regard de Jelena, bleu profond, posé sur moi au bord d’une indignation. Sans doute faudrait-il la reprendre par le commencement, cette histoire, sachant qu’un commencement n’est jamais qu’une entrée en lumière. La missive lui demande s’il accepterait de passer en revue avec elle les œuvres de son père qui sommeillent depuis son décès dans la maison familiale de Guissény, sur la côte bretonne,…
Christophe MEURÉE (dir.), Le monde de François Emmanuel, A.M.L., coll. « Archives du futur », 2022, 492 p., 28 €, ISBN : 978-2-87168-089-5Si on ne présente plus François Emmanuel, on peut sans fin le redécouvrir, à l’exemple de Jean-Luc Outers qui confie s’emparer régulièrement, au hasard, de l’un de ses romans – et l’étagère qu’ils peuvent occuper dans une bibliothèque est longue – pour y picorer une page, un bref extrait, une ligne. Le volume Le monde de François Emmanuel permettra, à celles et ceux qui ont trop longtemps ajourné le bonheur de faire sa rencontre, de l’approcher cette fois en exhaustivité comme en intimité.« Un monde », quel écrivain n’en est pas un ? Sa labyrinthique biographie, comprenant romans, nouvelles, essais, théâtre,…
François EMMANUEL, Dressing room, Lansman, 2022, 40 p., 10 €, ISBN: 978-2-8071-0344-3François EMMANUEL, Les trains dans la plaine, Lansman, coll. « Théâtre à vif », 56 p., 11 €, ISBN : 978-2-8071-0345-0“Les gens vont au théâtre pour se distraire les idées mais aussi pour se mesurer au monde, savoir ce qui est bien et pas bien, ce qui est condamnable ou non, ce que l’on prend en pitié. Ça fait réfléchir, ça remue les profondeurs, dans l’inconscient. Les gens vont se voir finalement.” Michael Lonsdale, À voix nue, France culture, 2011Michael Lonsdale résume bien cette étrange machine qu’est le théâtre avant que d’être spectacle. François Emmanuel vient de publier deux pièces aux éditions Lansman, Dressing room et Les trains dans la…
Les écrivains belges ont une prédilection pour les chambres. Qu’ils en situent trois à Manhattan (Simenon), qu’ils les garnissent de miroirs pour y poursuivre leur expérience continue (Nougé), qu’ils y observent la nuit remuer (Michaux), dans leur imaginaire, ces espaces clos s’ouvrent sur tous les possibles. François Emmanuel s’est, lui aussi, laissé happer par l’attraction camérale et nous emmène dans une ronde tout à tour sensuelle, érotique, charnelle, déclinée en trente-trois portraits de femmes.Presque chacune des figures présentées ici est une professionnelle, dans la mesure où la libido qui les dirige, leur façon de l’assouvir, la relation qu’elles proposent de vivre, sont largement tributaires de leur travail. Ainsi, le narrateur – « je » comblé…
Guérir par l’écriture ? est une question qui en cache d’autres, et c’est certainement pour son amplitude et ses ombres que François Emmanuel l’a choisie pour titre de ce petit essai condensé et érudit, qui explore les points de jonction et de rupture entre la vie et l’œuvre, entre les chemins thérapeutique et artistique qui jalonnent le parcours des auteurs et des autrices. En deux parties dont la seconde s’attache à exemplifier les réflexions développées dans la première, l’auteur interroge le processus de création et ses répercussions sur le corps des auteurs et autrices à partir du courant de l’art-thérapie. Mais plutôt que de se consacrer aux ateliers en tant que tels, François Emmanuel décale le concept et l’applique non plus à des écrivants (des…
François EMMANUEL, Le cercle des oiseleurs, Impressions nouvelles, 2022, 304 p., 20 €, ISBN : 978-2-39070-010-4Un titre énigmatique, assorti d’une couverture attrayante : il ne nous en faut parfois pas davantage pour prendre en mains un roman et le feuilleter, mus par l’envie d’en savoir plus. La patience est cependant ici de mise, comme elle s’impose au personnage principal dont nous emboitons le pas. Léo Vogels (!) est employé dans une société dont l’activité, aux contours incertains, repose sur des procédures strictes et nécessite des réunions régulières où il est bon de parsemer régulièrement les propos que l’on tient de termes empruntés au marketing moderne. Dans cet univers où les rapports de force tout à la fois brutaux et feutrés régissent les relations,…
Le « dit », genre en vogue dans la littérature médiévale, désigne initialement des textes proches des fabliaux et des lais, pour ensuite évoluer vers une poétique lyrique et narrative, tout à la fois. Avec Le dit de la renarde, la poésie de François Emmanuel subtilement liée aux gravures de Chris Delville livre une figure poétique qui aboutit à une sorte de « Voir dit » – continuons la référence aux lettres du Moyen Âge et à l’incontournable Guillaume de Machaut –, une aventure où ce que la renarde dit rythme l’itinéraire initiatique d’un « je » scandé par l’esprit animal, l’adorée, l’être aimé, le corps, l’organique, le territoire, la belle animale envoûtante qui interpelle.la renarde ditcelle qui est en toin’est pas toin’est personnepersonne…
« Oléo : À l’enterrement d’une reine, il est prescrit de bander la jambe arrière gauche de son cheval personnel.L’animal n’est donc pas intégré à l’attelage qui tracte le carrosse funéraire mais il marche un peu en retrait, tenu au mors par un très jeune officier.À cause de l’entrave à sa jambe le cheval boite et sa claudication attire tous les regards. »Dans la litanie des crescendos et decrescendos d’un tango joué par deux musiciens, un rituel de mort se déploie autour de Dona Pia, vivante, qui va mourir, qui est morte.Un étrange équipage autour Dona Pia, Oléo le premier maître, Osandro, le second maître, Amadeo, l’amant de Dona Pia, Miro, son fils, Alfina sa sœur, Lala, sa petite-fille et Umberto son défunt mari.Tout…
Dans son dernier roman, l’écrivain belge François Emmanuel aborde la façon dont l’identité peut être mise en péril, sauvée, perdue à nouveau et peut-être à jamais, dans un récit intime revenant notamment sur la tragique histoire de l’ex-Yougoslavie.
Dans son dernier roman, l’écrivain belge François Emmanuel aborde la façon dont l’identité peut être mise en péril, sauvée, perdue à nouveau et peut-être à jamais, dans un récit intime revenant notamment sur la tragique histoire de l’ex-Yougoslavie.
En ouvrant ce livre, un changement horaire se produit.
J’imagine le lecteur entrer dans un grand bain avec une lenteur presque douloureuse. C’est un froid de neige, la neige « qui tombe et réenneige la neige sale ». Les yeux bleus de Jelena…
Dans sa nouvelle fiction sortie en début d’année aux Impressions Nouvelles, François Emmanuel nous partage le récit de la lente envolée de Léo Vogel, affecté par la disparition de son collègue Charlie Mutzinger, que la raison semble avoir abandonné. Partageant sans cesse ses impressions du ciel, « Mutzi » laisse dans son sillage une énigme persistante pour Léo : que disent les oiseaux ? Et que fait-on, dans ce Cercle des oiseleurs ?
Dans sa nouvelle fiction sortie en début d’année aux Impressions Nouvelles, François Emmanuel nous partage le récit de la lente envolée de Léo Vogel, affecté par la disparition de son collègue Charlie Mutzinger, que la raison semble avoir abandonné. Partageant sans cesse ses impressions du ciel, « Mutzi » laisse dans son sillage une…